Publié le Dimanche 16 octobre 2016 à 21h46.

BD : Anna Politkovskaïa, journaliste dissidente

De Francesco Matteuzzi et Elisabetta Benfatto Steinkis édition, 2016, 16 euros. 

Le 7 octobre 2007, il y a dix ans, Anna Politkovskaïa était abattue, froidement exécutée dans le hall de son immeuble, le jour même de l’anniversaire de celui dont elle dénonçait la dérive, Vladimir Poutine, le commanditaire de ce meurtre. Journaliste de Novaïa Gazetta, militante des droits de l’homme, Anna Politkovskoïa fut l’une des premières à dénoncer les atrocités commises durant le conflit en Tchétchénie, dans les années 1990. Reporter de guerre, témoin engagée, son courage fut reconnu et salué par de nombreux prix. Refusant toute compromission avec le pouvoir en place, elle avait fait l’objet de nombreuses menaces de mort.

Le scénariste Francesco Matteuzzi et la dessinatrice Elisabetta Benfatto lui rendent hommage dans une courte BD, acte aussi de mémoire. Il ne s’agit pas à strictement parler d’une biographie mais d’un témoignage sur les faits déterminants qui ont abouti à son assassinat par le régime russe, régime qui avait réservé le même sort à certains parmi ses contacts qui avaient osé lui parler. Ses reportages en Tchétchénie, sa négociation avec les terroristes du théâtre de la Doubrovka, la prise d’otage de l’école de Beslan où elle tente de se rendre, son empoisonnement et, finalement, son assassinat sont autant d’images fortes de la guerre, du terrorisme, de la répression et de la torture. Autant d’actes d’accusation des mœurs du régime de Poutine qui ne lui pardonna pas d’avoir notamment dévoilé le rôle des services russes dans le massacre du théâtre de la Doubrovka en 2002 à Moscou, pris d’assaut après une prise d’otage. Plus de 130 personnes y avaient trouvé la mort, après que les forces d’assaut eurent diffusé un gaz dans le bâtiment…

« Moi, je vois tout, voilà le problème » : cette phrase d’Anna Politkovskaïa est citée au début du livre. Ce dernier est plus qu’une bande dessinée, « c’est un récit-­témoignage » introduit par le texte d’une comédienne italienne qui a interprété un monologue théâtral dédié à Anna Politkovskaïa. Il est accompagné d’une chronologie des faits, d’un texte d’Andrea Riscassi (journaliste et fondateur de l’association Annaviva) et d’un long entretien avec Paolo Serbandini (réalisateur de deux documentaires sur la journaliste).

Anna Politkovskaïa était la 21e journaliste assassinée en Russie depuis l’élection de Vladimir Poutine en 2000...

Yvan Lemaitre