Publié le Dimanche 17 février 2013 à 20h19.

Cinéma Công Binh la longue nuit indochinoise

Cinéma : Công Binh la longue nuit indochinoise de Lam Lê. Sortie le mercredi 30 janvier 2013Ce film retrace un épisode de la colonisation française en Indochine et plus particulièrement au Vietnam, par le recrutement forcé de 20 000 travailleurs jeunes, issus de la paysannerie pauvre, envoyés en France au début de la Deuxième Guerre mondiale (fin 39, début 40) afin de remplacer des travailleurs français envoyés dans les casernes. Le spectateur découvrira dans ce film les conditions inhumaines faites à ces hommes. Les témoignages d’une quinzaine de survivants, tous âgés de plus de 90 ans lors du tournage et dont plusieurs sont décédés depuis, sont le moyen pour le cinéaste d'exhumer quelques documents. Ce film, sans pathos, relate en particulier le travail de deux militants vietnamiens, étudiants en France à cette époque, membres de la IVe Internationale, qui ont organisé l’alphabétisation de ces jeunes hommes, illettrés pour la plupart. Ce travail fut complété par une sérieuse formation politique en vue de la participation à la lutte de libération du peuple vietnamien ainsi qu’à une solide information sur ce qui concernait les débats – sanglants – au sein du mouvement ouvrier à cette époque.Ces hommes étaient considérés comme un danger pour la France. Alors qu’ils auraient dû être rapatriés à la fin de la guerre, en 1945 au plus tard, ils ne revinrent sur la terre natale qu’à la fin de la guerre française d’Indochine, après les accords de Genève de 1954. Ce retour ne fut pas glorieux, ils étaient suspectés de trotskysme et traités en « traîtres à la patrie », considérés comme soldats sous l’uniforme français, alors qu’ils avaient été exploités honteusement jusqu’en 1945. Puis sous les consignes de l’Oncle Hô, ils s’étaient engagés dans l’industrie pour revenir au pays avec une compétence professionnelle.Un beau film qui ne peut laisser insensible ceux et celles pour qui la question sociale est une blessure toujours ouverte.Jean-Paul Petit