Publié le Lundi 13 juillet 2015 à 11h39.

Jardiner sur sol vivant. Quand les vers de terre remplacent la bêche !

De Gilles Domenech. Larousse pratique, 2015, 14,90 euros.

Dans ce petit livre très didactique de 160 pages qui remet en cause de nombreux lieux communs, Gilles Domenech a produit un ouvrage essentiel à tous les jardiniers et amoureux de la terre.

Dans une première partie, l’auteur s’attache à expliquer le fonctionnement du sol et le système sol-plante. Le propos est volontairement simplificateur, ce n’est pas un ouvrage universitaire. Il s’agit d’expliquer les différents flux d’éléments et d’énergie entre les plantes et le sol. Le sol n’étant évidemment pas uniquement un substrat minéral mais un lieu où la vie grouille : la masse des espèces endogées (vivant dans le sol) est supérieure à celle des espèces épigées. Les seuls vers de terre représente 70 % de la masse animale terrestre.

Dans ce système, les plantes fournissent l’énergie primaire grâce à la photosynthèse qui leur permet de capter le carbone de l’air avec lequel elles vont produire des molécules pour se construire (cellulose, lignine) mais aussi des sucres pour nourrir les organismes qui vivent dans la rhizosphère (autour des racines). Ce sont donc les plantes qui nourrissent le sol, par les deux litières, celle de surface composée des feuilles et des branches qui tombent, ou encore des plantes mortes, et de la litière souterraine composée des racines mortes (les plantes annuelles laissent évidemment leurs racines mortes dans le sol, quant aux vivaces elles les remplacent tout au long de l’année). La phrase « il faut nourrir la terre » est donc à oublier et à remplacer par « la plante nourrit le sol ». Les plantes et les vers structurent le sol et permettent ainsi à la vie de se développer dans le sol (qui ne doit pas être compacté, l’eau et l’air doivent pouvoir y circuler facilement). Le sol gère la fertilité du sol, il stocke le carbone, les nitrates, et tous les éléments dont les plantes ont besoin. De nombreuses symbioses lient les plantes aux champignons et aux bactéries du sol.

Collaborer avec la nature...

Deux grandes conséquences : pour qu’un sol soit vivant, il faut des végétaux, tout le temps, et il ne faut pas perturber la vie des sols. Il faut donc arrêter tous les travaux du sol et n’opérer qu’en surface : adieu motoculteurs, bêches et autres objets de torture. Ceux-ci tuent toute vie végétale et une bonne partie de la vie du sol dans les premiers 20 cm, là où justement la vie est la plus active ; ils détruisent la structure du sol et en plus ils laissent le sol à nu.

Dans un potager, on exporte beaucoup de matière (puisqu’on cultive les légumes pour les manger) et on voudrait en plus augmenter la vie du sol. Il faut donc donner un petit coup de pouce en apportant des matières organiques. Comment ? En semant des intercultures que l’on ne va pas prélever et en paillant avec les branchages tirés d’une haie, les tontes de gazon, en utilisant la végétation spontanée (finis aussi les voyages à la déchetterie…), les déchets de cuisine, plus besoin de composter (avec des exceptions comme les toilettes sèches).

Ce livre n’est pas un manuel de jardinage mais il ouvre des pistes sur différentes techniques (semis direct, « engrais verts », etc.). Plusieurs jardins d’amateurs sont décrits avec leurs particularités. Avec cette nouvelle manière de jardiner, on collabore avec la nature, on ne la combat pas ; on ne cherche pas à la dominer, on encourage au contraire la biodiversité. Jardiner n’est plus une corvée :  plus de tâches éreintantes, toutes et tous peuvent participer ! Et le plaisir de ne plus avoir à passer à la pompe ou chez les marchands de matériel de motoculture n’est pas négligeable, et un premier pas vers l’autonomie…

François Favre