Publié le Mercredi 20 janvier 2016 à 09h24.

La fille du patron

De Olivier Loustau,avec Christa Théret, Olivier Loustau et Florence Thomassin. Sortie le mercredi 6 janvier.

Parfois le cinéma réaliste français réussit à nous parler d’autre chose que des soucis existentiels des bien nés... Ici, les héros ne sont pas journalistes, avocats ou médecins. Ils ne cherchent pas leur chat angora dans le 16e arrondissement de Paris. Ils travaillent tous chez Tricot, une usine de textile. Ils travaillent en 3x8 et s’ils cherchent quelque chose, c’est la bagarre...

L’histoire est assez simple : la fille du patron des usines Tricot, après de brillantes études, vient travailler comme ergonome (avec des méthodes et des discours quelque peu fantaisistes d’ailleurs...) dans l’usine de son père. Elle va prendre pour cobaye, Vital, un chef d’équipe de 15 ans son aîné. Patatras, les héros s’embrassent et finissent tout nus dans le même lit.

Mais derrière cette romance socialement improbable, c’est la vie d’un groupe d’ouvriers qui est décrite, à travers des scènes, assez rares au cinéma, de travailleurs du textile au travail, qui règlent leur machine, les alimentent en fil… Il y a aussi les femmes, les ouvrières de cette même usine, qui font bloc pour se défendre entre elles, et en premier lieu celle trompée par Vital, le héros du film. Le film montre les débats et les conflits avec la hiérarchie et les difficultés que rencontre cette PME familiale, que le patron peine à se résoudre de vendre.

Ce groupe d’ouvriers, on le retrouve en dehors de l’usine, sur le terrain. Car l’équipe de l’usine arrive dans les phases finales d’un championnat de France de rugby inter-entreprises.

Ce qu’il y a de rare dans ce film, ce sont les corps des héros. Des corps abimés par le travail et par la vie. Des gras, des gros, des tordus, des blessés. Et puis il y a aussi la diversité du monde du travail. Des blacks, des beurs… Et leur combat, ensemble sur le terrain, semble incarner celui qui s’annonce dans l’entreprise.

On est évidemment tenté de comparer ce cinéma à celui de Ken Loach, tant ils sont peu nombreux à filmer les prolos, le monde du travail ou les immigrés. Mais cette comparaison, un peu plombante, ne rendrait pas justice à ce (premier) film qui trace sa propre voie, sans tendre vers la démonstration politique trop évidente.

Pierre Baton