Publié le Lundi 9 novembre 2015 à 09h45.

Le bouton de nacre

De Patricio Guzman, sortie le 28 octobre 2015. 

Pour beaucoup, le nom de Patricio Guzman évoque d’abord ses films sur l’Unité populaire chilienne et le coup d’Etat de Pinochet et, notamment, « La bataille du Chili » (1975-1979). En 2010, il avait réalisé « La nostalgie de la lumière » : dans le désert du Nord du Chili, les télescopes observent les galaxies tandis que la sécheresse favorise la conservation des restes humains et, en dernier lieu, ceux des victimes de la dictature que des femmes de disparus essaient de rassembler et d’identifier. Ce nouveau documentaire, « Le bouton de nacre », s’inscrit dans la continuité du précédent mais dans une région totalement différente : le sud, la Patagonie, terre où l’eau est omniprésente. L’eau est condition de la vie dans le cosmos rappelle le commentaire. En Patagonie, dans des conditions climatiques extrêmes, des peuples indiens vivaient avant la colonisation. A partir du XIX° siècle, ils ont été massacrés sauvagement par les militaires et les colons venus peupler la région qui ont même payé des chasseurs d’Indiens. Plus récemment, ce sont les opposants que la dictature a enfermés dans des camps et éliminés en les jetant dans l’océan d’hélicoptères en vol, lestés par des morceaux de rail. Deux boutons de nacre font le lien entre les éliminations sanglantes d’hier et celles d’aujourd’hui : l’un est celui offert à un Indien par un explorateur, l’autre est incrusté dans une pièce de métal trouvée au fond de l’océan. Le film, émouvant et poétique, permet d’entendre la voix des tout derniers Indiens et celles des opposants qui ont survécu.

Henri Wilno

Leau est le fil conducteur de ce documentaire chilien : des peuples indigènes décimés en Patagonie aux disparus de la dictature de Pinochet. Peuples autochtones de l’eau d’hier, corps torturés des prisonniers politiques perdus dans l’océan Pacifique : un même destin tragique que l’eau unit.

Voici un documentaire bouleversant, poétique aussi, qui nous fait voyager dans le Cosmos, dans les mots des vingt derniers descendants directs des peuples patagons, dans les témoignages des survivants des geôles de Pinochet, et dans les espaces immenses de la Patagonie.

Certains disent que l’eau a une mémoire. Ce film montre qu’elle a aussi une voix.

Sylvie F.