Film français de Christophe Duthuron (2018).
Trois amis d’enfance se retrouvent dans leur village du sud-ouest pour les obsèques de Lucette, la compagne de l’un d’entre eux, Antoine. Une jeune femme (Sophie), petite-fille et portrait vivant de la défunte, accompagne son grand-père. La découverte d’une lettre pousse ce dernier à partir brusquement en Toscane commettre un crime contre son ancien patron. Les deux autres papys et la petite-fille se lancent à sa poursuite.
Une adaptation ratée
Le film Les vieux fourneaux est issu d’une BD à succès (des millions d’exemplaires écoulés) sur fond de contestation du système capitaliste par trois compères aux cheveux blancs, accompagnés de la non moins contestataire Sophie, enceinte jusqu’aux yeux. Cette adaptation constitue une franche déception. L’esprit subversif de la BD est complètement dilué dans une comédie familiale campagnarde, rigolote sans plus.
Sachant que le propre créateur de la BD (Wifrid Lupano) a scénarisé le film, il est navrant de sortir de la projection avec l’impression que le patron de l’usine Garan-Servier du village, qui sucre les fraises en Italie, a été plus cohérent, valable et sympa que nos trois papys contestataires : Antoine, le cégétiste interprété par Roland Giraud, Pierrot, l’anarchiste énervé (Pierre Richard) et Mimile, rugbyman et globe-trotter contre son gré (Eddy Mitchell).
Pourtant, bien des scènes sont décalquées du premier tome de la BD. Comment résister à la colère de Sophie face à de vieilles bigotes de retour du Vatican qui s’extasient sur son gros ventre : « Votre génération est à l’origine de tous les fléaux du monde moderne ! La mondialisation, l’ultralibéralisme, la pollution, la surexploitation, l’agriculture extensive, l’épuisement des ressources, les paradis fiscaux… Tout ! Et en plus, vous vivez vieux ! »
Mais l’étroitesse du budget, un découpage scénaristique qui hésite entre BD et cinéma, une réalisation balbutiante, entre drame et comédie familiale, expliquent sans-doute le manque de rythme du film et les gags qui tombent à plat. Enfin Roland Giraud n’est pas du tout crédible dans le personnage d’Antoine le syndicaliste, et cela plombe le film de bout en bout. Heureusement, il reste l’épatante Alice Pol pour interpréter Sophie, avec ses marionnettes et quelques réparties cinglantes qui caressent les anticapitalistes dans le bon sens du poil.
Sylvain Chardon