La Boîte à bulles, 2024, 176 pages, 22 euros.
Vu d’ici on aurait parfois cette idée que nous aurions la police la plus brutale et un État le plus raciste. Or chez nos voisins européens, en Belgique par exemple, la police tue et ment tout autant et de la même manière ; le racisme et la xénophobie d’État existent, tout autant systémiques, avec les mêmes conséquences. La chasse aux réfugiéEs et les drames qui vont avec font l’actualité malheureusement aussi.
Chasse aux réfugiéEs
L’auteur de la BD, Manu Scordia, nous raconte cette histoire triste, survenue en 2018, d’une fille kurde tuée d’une balle dans la tête, par la police qui poursuivait la camionnette de migrantEs dans laquelle elle se trouvait avec ses parents et d’autres refugiéEs qui cherchaient à passer la frontière. Il s’agit d’une enquête pour reconstruire minutieusement la chaîne d’évènements qui va conduire au meurtre. On voit comment la police, la justice et le pouvoir se mettent à inventer une autre histoire, en cachant des éléments, ne s’embêtant pas de mensonges pour se dédouaner.
Manu Scordia est révolté et il décrit une machine infernale qui opprime, qui pourchasse, qui exclut. Et le problème n’est pas seulement une police qui tue mais bien « toute une société raciste et malade ». C’est le cas en Belgique, en France, un peu partout en Europe et dans le monde. Les politiques anti-migratoires, Frontex en Europe, les murs ailleurs, les fermetures de frontières, les chasses aux migrantEs, les expulsions, ces politiques sont criminelles car elles conduisent à tuer des gens qui fuient la misère et les guerres. En clair, la police tue, le racisme tue, les frontières tuent.
Combattre l’invisibilisation
Mawda, cette petite fille de 2 ans, est une histoire, une vie parmi des milliers d’autres. Elle meurt tuée sur une route comme d’autres meurent noyéEs dans la mer Méditerranée ou dans la Manche, dans la Bidassoa (frontière franco-espagnole) et d’autres meurent de froid dans la Vallée de la Roya ou du côté de Briançon (frontière franco-italienne).
Cette BD est un témoignage et une accusation efficace. Elle est aussi et surtout un hommage rendu à toutes ces personnes qui cherchent à vivre dignement quelque part. Raconter cette histoire, permet de combattre l’invisibilisation de ces drames subis par des gens ultra précariséEs, condamnéEs à la misère, à la fuite et à la peur permanentes. Un plaidoyer pour l’ouverture des frontières, pour la liberté de circulation et d’installation pour toutes et tous.