Publié le Mardi 7 avril 2015 à 07h33.

Roman : White trash

John King, Au diable vauvert, 2014, 22 euros.

Acheter à la librairie La Brèche.

John King, l’un des plus grands écrivains de la culture populaire post-thatchérienne, signe, derrière ce titre provocateur1, une fresque satirique de la société britannique sur fond de destruction des services sociaux et de compression d’effectifs dans la santé, un face-à-face psycho-sociologique glaçant entre deux incarnations des classes en lutte, l’infirmière au grand cœur Ruby et son supérieur, le cynique et arrogant Jeffreys.

Responsable des ressources et des dépenses, Jeffreys méprise foncièrement ces « nègres blancs qui infestent chaque nation civilisée » et gênent la marche de la société capitaliste, malades et employés syndiqués, « difficiles à convaincre » du bien-fondé libéral à cause de « leur mauvaise éducation ». Si pour Ruby, l’hôpital est un microcosme de la société où chacun a quelque chose à raconter, il est un lieu de purification sociale pour ce pur produit de la « troisième voie » blairiste qu’est Jeffreys.
Deux mondes imperméables, retranscrits dans deux idiomes de classe aux antipodes, qui ne se rencontreront jamais jusqu’au clash final, inattendu et terrifiant. Un roman noir, âpre et dérangeant, paru en 2002 et enfin traduit (par Clémence Sebag) en français, étonnant d’actualité à l’heure des attaques massives dans le secteur de la santé.

Les libraires de la Brèche

  • 1. « White trash » (« déchet blanc » ou « nègre blanc ») est une expression argotique et injurieuse américaine du milieu du XIXe siècle désignant les Blancs pauvres dont la condition était jugée plus médiocre encore que celle des Noirs.