Publié le Dimanche 19 juin 2016 à 13h23.

Front Populaire, front-populisme

Les commémorations du Front Populaire de 1936 sont une occasion idéale pour nous réapproprier des pans entiers de la stratégie trotskyste.

Malheureusement l'article titré « la grève générale de mai-juin 1936 » et publié par l'anticapitaliste (revue) n°77 ne remplit ce rôle que partiellement. Le titre lui-même est déjà discutable – ce n'est pas pour rien que Guérin ou Trotsky parlent de « révolution », d'un processus bien plus large que la grève, et qui surtout pose la question du pouvoir.

D'où cette contribution.

Problèmes du Front Unique

« Une victoire des masses ouvrières » (La Vérité)

Les faits sont connus. Le 6 février 1934, dans la foulée de la victoire nazie en Allemagne, l'extrême-droite tente de prendre le pouvoir. Elle échoue faute de soutien de la grande bourgeoisie.

Mais la crise politique précipite les processus en gestation, l'aspiration de larges masses à en finir avec la politique de division menée par le PCF sur ordre de Moscou devient intenable. Le 8 février, L'Humanité dénonce encore le PS (SFIO) :

« Nous sommes prêts à nous battre avec tous ceux qui qui veulent réellement lutter contre le fascisme. Mais comment réaliser l'unité d'action avec ceux qui soutiennent les gouvernements lorsqu'ils diminuent les salaires ? Avec ceux qui torpillent les grèves ? »1 Etc., etc.

Lors de la journée grévistes du 12 février 1934, les masses passent littéralement sur le corps des dirigeants staliniens en imposant la jonction des manifestations socialistes et communistes sur le cours de Vincennes. Ce qu'en dit La Vérité2 d'alors n'est pas inutile :

« (…) il s'agit d'une victoire des masses ouvrières elles-mêmes. Depuis le 6 février, l'unité d'action a été la revendication fondamentale des travailleurs qui y voyaient une des conditions préalables du succès de leur lutte. Sous toutes les formes, et dans les différents partis et organisations centristes et démocratiques, une pression dans ce sens s'est exercée, venue des profondeurs de la masse populaire (…)

Pendant des semaines et des mois (particulièrement en avril et en mai) l'action des bureaucrates dirigeants s'exerça contre la réalisation du front unique des organisations, c'est‑à‑dire contre les masses. (…) Mais l'action à la base ne cessait de rapprocher contre le fascisme les combattants des différentes tendances et couches sociales. En juin, ces manifestations se firent plus amples, plus serrées, plus fréquentes : l'heure était proche où les bureaucrates devraient céder »3.

Impossible, évidemment, de ne pas voir que l'explosion des luttes qui survient en 1934-35, la situation pré-révolutionnaire qui se crée, est le produit de la réalisation préalable du Front Unique, de l'arrêt de la politique de division menée en premier lieu par le Kremlin.

La leçon ne vaut évidemment pas que pour 1936.

Quel programme ?

Le 27 juillet, PCF et SFIO signent un pacte d'unité d'action. La dénonciation de ses insuffisances va être centrale dans la politique défendue par Trotsky durant ces semaines. Le pacte comporte quelques mesures simples :

  • désarmement et dissolution des ligues fascistes ; libération de tous les antifascistes emprisonnés ; contre la terreur fasciste en Allemagne et en Autriche ;

  • défense des libertés démocratiques ; dissolution de la Chambre et représentation proportionnelle ; lutte contre les décrets‑lois ;

  • lutte contre les préparatifs de guerre.

Il s'agit donc d'un accord platement « antifasciste ». Ce qu'écrivaient à ce propos St. Just et Ch. Berg mérite d'être cité :

« Le pacte d'unité d'action entre le PS et le PCF est un fait d'une considérable portée politique en soi, et qui répondait aux aspirations irrépressibles des masses et des militants. Son contenu n'en a pas moins une signification politique tout aussi importante : les dirigeants du PS et du PCF ont fait l'unité, mais déjà ils dressent une digue contre le mouvement des masses pour le contenir dans le cadre de l'ordre, de la société bourgeoise, le contraindre à respecter la propriété privée des moyens de production, l’État bourgeois.

C'est au gouvernement, à l’État bourgeois, de dissoudre et de désarmer les ligues fascistes que le capital financier organise, subventionne et arme. La défense des libertés démocratiques s'entend comme défense du système parlementaire. La dissolution de la Chambre et la représentation proportionnelle sont les revendications les plus audacieuses de ce pacte, mais elles restent néanmoins dans le cadre précis du parlementarisme, et de toute façon, elles ne feront l'objet d'aucune action politique et resteront des clauses de style. « Lutte contre les préparatifs de guerre » est une formule évasive qui en soi ne veut rien dire. « Lutte contre les décrets-lois » est une formule tout aussi platonique, et le reste est à l'avenant.

Il n'est absolument pas question de chasser le gouvernement Doumergue (…) »4.

La question du pouvoir

Tout ceci est encore évoqué, quoique du bout de la plume, par l'Anticapitaliste (Revue). La suite est par contre carrément ignorée et c'est regrettable.

Cette suite, c'est le combat mené par les partisans de Trotsky pour féconder le Front Unique, le doter d'un programme adapté, de l'intérieur puisqu'ils en étaient partie prenante. Trotsky insiste sur la nécessité d'une politique centrée sur la question de la prise du pouvoir.

« Le but du front unique des partis socialiste et communiste ne peut être qu’un gouvernement de ce front, c’est-à-dire un gouvernement socialiste-communiste, un ministère Blum-Cachin »5.

C'est toute une tradition politique que Trotsky inaugure alors. En mars 1935, dans Encore une fois, où va la France ?, il revient extensivement sur la question. Dans une section significativement intitulée « les revendications immédiates et la lutte pour le pouvoir », il fait cette remarque décisive :

« La thèse marxiste générale : les réformes sociales ne sont que les sous-produits de la lutte révolutionnaire, prend à l'époque du déclin capitaliste l'importance la plus immédiate et la plus brûlante. Les capitalistes ne peuvent céder aux ouvriers quelque chose que s'ils sont menacés du danger de perdre tout ».

On sait que cette méthode sera ensuite généralisée dans le programme de la IV° Internationale, où les revendications « de transition » sont définies comme

« partant des conditions actuelles et de la conscience actuelle de larges couches de la classe ouvrière et conduisant invariablement à une seule et même conclusion : la conquête du pouvoir par le prolétariat »6.

Dans ce contexte, le mot d'ordre de « gouvernement socialiste-communiste » devait être compris lui-même comme une transition vers un authentique gouvernement « ouvrier-paysan », le gouvernement de la dictature du prolétariat7.

La lutte contre le bonapartisme

Autre question ignorée par la Revue, et c'est dommage, celle de la lutte contre la tendance au renforcement du régime

À la suite du 6 février 1934, l'ancien président G. Doumergue avait pris la tête d'un ministère « d'Union Nationale » pour mener une politique de « réformes ». Il s'agissait notamment de mener une réforme constitutionnelle, d'en finir avec le « régime des partis » qui handicapait lourdement la domination de la bourgeoisie sur le pays.

Concrètement, l'objectif était d'élargir l'usage des décrets, de donner au président de la République la possibilité de dissoudre la Chambre - bref d'avancer vers un « État fort ».

Dans cette situation, les partisans de la IV° Internationale, avec leurs faibles forces, n'eurent cesse de formuler les axes de la résistance à cette offensive. L'article titré « Préparons la grève générale pour chasser le gouvernement Doumergue et instaurer une Assemblée unique » publié dans La Vérité du 3.VIII.1934 mérite la relecture :

« Mais nous demande-t-on, par quoi remplacer le gouvernement Doumergue ? Nous ne sommes pas encore en état de lui substituer le pouvoir des soviets, la classe ouvrière n'en est pas là (…) Alors par quoi remplacer Doumergue ? A cette question, notre programme d'action répond « une Assemblée unique8 doit concentrer le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif. Les membres en seraient élus pour deux ans, au suffrage universel depuis l'âge de dix-huit ans9, sans distinction de sexe ni de nationalité. Les députés seraient élus sur la base d'assemblées locales, constamment révocables par leurs mandants et recevraient pendant le temps de leur mandat le traitement d'un ouvrier qualifié ». Telle est la seule mesure qui entraînerait les masses en avant au lieu de les repousser en arrière. Une démocratie plus large faciliterait la lutte pour le pouvoir ouvrier »10.

On voit au passage dans quelle tradition politique s'inscrit le combat mené contre les institutions bonapartistes actuelles, celles de la V° République….

Le Front Populaire

Une situation pré-révolutionnaire

L'anticapitaliste (revue) décrit brièvement la constitution du Front Populaire, sans en tirer lesnécessaires conclusions politiques. En fait, il faut se remettre dans le contexte pour saisir. La réaction ouvrière au 6 février 1934 ouvre la voieune situation pré-révolutionnairequi va durer jusqu'à juin 1936, où la situation se mue en crise révolutionnaire ouverte.

Cette poussée des masses se voit dans le succès d'un certain nombre de mouvements (Brest, Toulon…), de manifestations – la revue cite à juste titre les manifestations monstres du 14 juillet 1935.

Mais au-delà des luttes, il y a le renforcement du mouvement ouvrier.

Jusqu'à 1934, la politique de division menée par lePCF l'isolait - en 1933, il avait moins de 30 000 adhérents. Mais son tournant « unitaire » lui permet de coller aux aspirations de l'électorat ouvrier et ses effectifs explosent : 90 000 membres en 1935, près de 300 000 en 193611 ! Ce renforcement est aussi manifeste au niveau électoral.

La croissance des effectifs socialistes est moindre, mais néanmoins réelle : ils étaient 120 000 durant les années 20, et atteindront 200 000 en 1937...

Au niveau syndical, la CGT compte 490 000 adhérentsen 1933, la CGTU 258 000. Fin 1936, la CGT (réunifiée en 1935) a 4 millions de membres...

Enfin, ce renforcement du mouvement ouvrier se conjugue avec une incontestable poussée à gauche :

  • Au PCF, Doriot, exclu en juin 1934, est alors le défenseur d'une politique de Front Unique (ce n'est qu'à la fin des années 30 qu'il entame sa dérive vers l'extrême-droite). Son écho au sein du PCF et au-delà est alors réel (et significatif). JP Joubert parle à ce propos de « bataille sur la question du Front Unique » et note que la direction stalinienne dut tolérer une opposition ouverte en son sein durant cinq mois, ce qui indique bien l'écho que Doriot recueillait...12

  • Dans la SFIO, la cristallisation d'une aile centriste, la constitution de la Gauche Révolutionnaire de M. Pivert a lieu en septembre 1935. Les résultats des motions GR au sein de la SFIO seront en progression constante : 11 % en février 1936, 13,5 % en mai 1936, 16,5 % en juillet 1937, et 21,5 % en juin 1938…13 A propos de la GR, D. Guérin (qui en était) note que « notre seule existence dans le parti, depuis trois mois, remuait les masses »...14

Il est donc incontestable qu'on était face à une recherche à gauche de la part de larges masses.

Le Front Populaire, négation du Front Unique

On comprendra donc aisément que dans ces conditions, tant la bourgeoisie française que le Kremlin, craignent les potentialités ouvertes par la constitution du Front Unique dans le mouvement de février 1934. Certes le programme de ce front était ce qu'il était. Il n'en demeure pas moins que son existence-même était lourde de dangers pour les capitalistes et les bureaucrates – il ouvrait la voie et rend possible le déferlement.

Pour liquider le Front Unique , l'objectif va donc être de mettre les partis ouvriers sous la domination directe de la bourgeoisie. L'idée « géniale » du Kremlin sera donc de présenter comme un « élargissement » du Front Unique, l'extension de ce front aux radicaux, au parti traditionnel du Capital sous la III° République :

« Le parti radical est le parti à l'aide duquel la grande bourgeoisie entretenait les espoirs de la petite bourgeoisie en une amélioration progressive et pacifique de sa situation. Les radicaux n'ont pu jouer ce rôle qu'aussi longtemps que la situation économique de la petite bourgeoisie restait supportable, qu'elle n'était pas véritablement ruinée, qu'elle gardait espoir en l'avenir. Le programme des radicaux a toujours été, certes, un simple chiffon de papier. Ils n'ont accompli et ne pouvaient accomplir aucune réforme sociale sérieuse en faveur des travailleurs: la grande bourgeoisie qui détient tous les véritables leviers du pouvoir, les banques et la Bourse, la grande presse, les hauts fonctionnaires, la diplomatie, l’État-major, ne le leur eût pas permis. Mais ils obtenaient de temps à autre, en faveur de leur clientèle, surtout en province, quelques petites aumônes et entretenaient par là les illusions des masses populaires »15.

Il va donc de soi qu'une alliance entre radicaux et organisations ouvrières était la négation même du Front Unique Ouvrier. La présence desdits radicaux dans le front rendait impensable toute politique anticapitaliste. C'était la subordination des partis ouvriers à un parti bourgeois. Comme l'écrit La Vérité :

« On est ainsi passé du front unique socialiste, à une coalition bourgeoise socialiste »

Au nom de l'Unité, les partis ouvriers sont mis à la remorque de la bourgeoisie « démocratique » représentée par les radicaux, comme l'affirme le programme trotskyste :

« Sous le signe de la révolution d'Octobre, la politique conciliatrice des "Fronts populaires" voue la classe ouvrière à l'impuissance et fraie la voie au fascisme. Les "Fronts populaires" d'une part, le fascisme de l'autre, sont les dernières ressources politiques de l'impérialisme dans la lutte contre la révolution prolétarienne ».

D'où une agitation systématique pour le Front Unique, contre l'alliance avec les radicaux. Ainsi peut-on lire dans une déclaration Parti Ouvrier Internationaliste de l'époque les considérations suivantes :

« (…) on ne peut mener l'offensive avec l'ennemi dans sa propre formation, et l'ennemi, c'est aussi les radicaux, avec lesquels les chefs communistes et socialistes ne veulent absolument pas rompre (…) »

menant à un appel à « chasser les chefs radicaux pourris »16. Là encore, cette méthode sera ultérieurement systématisée par la IV° Internationale – voir le fameux « Rompez avec la bourgeoisie ! » du programme, les prises de position systématiques pour l'indépendance du mouvement ouvrier qui vont devenir typique du trotskysme.

Un programme bourgeois

Concernant le programme du Front Populaire, la Revue écrit :

« Le PC souhaite un programme très modéré qui n’« effraie » pas les classes moyennes ».

Les motivations du PC étaient en fait autres. Dès la fin 1934, le Kremlin et son appareil sont à la manœuvre pour colmater la brèche ouverte le 12 février. L'objectif est de dissoudre le Front Unique sous couvert d'élargissement. D'où la main tendue aux radicaux, puis aux catholiques, le chauvinisme stalinien, etc. Ce qui mène à un programme excluant toute atteinte à la propriété privée des moyens de production (notamment des nationalisations), assure la défense des institutions, de la Police, préserve l'oppression coloniale, etc.

Formuler la question ainsi que le fait la Revue, c'est bien sûr laisser croire que le programme du Front Populaire était simplement « trop timoré », auquel cas, il suffirait de le radicaliser. En fait c'est son objectif même, la défense de la république capitaliste, qui n'est pas celui du mouvement ouvrier.

Blum faisait une subtile distinction entre « exercice » et « conquête » du Pouvoir. Le programme du Front Populaire est évidemment celui de la première alternative, celui de la « gestion honnête et loyale » du système.

Les grèves de mai-juin 1936

Ce qu'écrit la Revue sur les grèves elles-mêmes ne mérite pas de discussion particulière.

Sans doute aurait-il fallu malgré tout insister sur la relation étroite qui existe entre combattivité et organisation. On ne peut guère expliquer le surgissement prolétarien d'alors sans rappeler que des millions de travailleurs rejoignaient alors la CGT réunifiée, des centaines de milliers adhéraient au PC voire à la SFIO. La grève générale ne tombe pas du ciel mais est le produit de processus sociaux et politiques multiformes, de l'unification des rangs ouvriers à partir de 1934.

Mais surtout, il fautaussi nécessaire d'insister sur le fait qu'en 1936, la classe ouvrière n'a pu se centraliser que partiellement face à l’État capitaliste.

La Revue note que les grève « ne sont issues d’aucun appel central », sans en tirer de conclusion. Or c'est justement une des grandes faiblesses du mouvement que les travailleurs n'aient pu utiliser leur organisation syndicale, la CGT, pour leur propre compte.

« les seules professions importantes où un mot d'ordre d'arrêt généralisé est lancé sont les mines du Nord et du Pas-de-Calais, le bâtiment, les cafés-hotels-restaurants de la région parisienne (...) »17

Inséparablement, on ne peut que constater que le niveau d'auto-organisation du mouvement demeura limité. Dit autrement la grève générale manqua d'un État-major, ce qui renvoie évidemment à la faiblesse des courants « lutte de classe », en premier lieu les trotskystes.

« Comment s’exerce le contrôle de la base sur les responsables ? Une véritable démocratie existe-t-elle et quelles formes prend-elle ? Et d'abord les responsables sont-ils élus ? Dans la très grande majorité des cas il faut répondre par la négative. »18

Tout ceci facilita évidemment le travail des dirigeants staliniens lorsqu'il fut temps de « savoir terminer une grève »...

Quelles leçons ?

L'article de la Revue se conclut sur la nécessité d'« un mai-juin 1936 allant jusqu'au bout ». Cette façon de prendre la question semble bien réductrice. D'ailleurs, il serait bon de s'interroger : quelles sont les conditions politiques permettant d'avancer dans cette direction ? On sait bien que les exhortations à lutter ne servent à rien, que l'essentiel est de formuler une politique globale orientée sur la réalisation du Front Unique de classe et donnant à la question du pouvoir l'importance qu'elle a.

Car la grande leçon de l'échec final de la vague révolutionnaire de 1934-36 (quelles que soient les concessions que dut faire la bourgeoisie), c'est celle de la crise du facteur subjectif :

« Le 9 juin 1936, nous écrivions: "La Révolution française a commencé." Il peut sembler que les événements aient réfuté ce diagnostic. La question est en réalité plus compliquée. Que la situation objective en France ait été et reste révolutionnaire, il ne peut y avoir de doute. (...). Cependant, comme l'indiquait déjà Lénine en 1915: "Ce n'est pas de toute situation révolutionnaire que surgit la révolution, mais seulement d'une situation telle qu'au changement objectif se joint un changement subjectif, à savoir la capacité de la classe révolutionnaire de mener des actions révolutionnaires de masse suffisamment puissantes pour briser (...) l'ancien gouvernement qui, jamais, même en période de crise, ne "tombe" si on ne le "fait" pas tomber." L'histoire récente a apporté une série de tragiques confirmations au fait que la révolution ne naît pas de toute situation révolutionnaire, mais qu'une situation révolutionnaire devient contre-révolutionnaire si le facteur subjectif, c'est-à-dire l'offensive révolutionnaire de la classe révolutionnaire, ne vient pas à temps en aide au facteur objectif »19.

Et là encore, la généralisation n'a pas tardé, avec la formule connue selon laquelle :

« La crise historique de l'humanité se réduit à la crise de la direction révolutionnaire »20.

Et le prix à payer pour cette crise, ce fut la possibilité qu'eurent les impérialismes de se lancer bientôt dans une nouvelle guerre mondiale, une fois liquidées les situations révolutionnaires qui avaient pu se nouer (Espagne, France), avec l'aide du Kremlin.

Là nous semble l'essentiel.

Malgré toutes les vicissitudes, les échecs (dont il faut tirer les enseignements et qui nous obligent à la plus grande humilité), le combat pour une nouvelle représentation politique ouvrière garde toute son actualité.

Le 17 juin 2016

P. Morsu

 

  • 1. Cf. J. Danos, M. Gibelin : Juin 36.
  • 2. La Vérité, juillet 1934. In P. Naville : L'entre-deux guerres.
  • 3. La Vérité, juillet 1934. In P. Naville : L'entre-deux guerres.
  • 4. St. Just, Ch. Berg : Fronts Populaires d'hier et aujourd'hui.
  • 5. L. Trotsky : Où va la France ? (Oct. 1934)
  • 6. L. Trotsky : programme de transition.
  • 7. On notera au passage l'extrême proximité méthodologique entre tout ceci et le mot d'ordre de « gouvernement anti-austérité » défendu par toute une aile du NPA. 
  • 8. Ce qui signifie la dispersion du Sénat.
  • 9. Dans d'autres textes, la Ligue précise que le droit de vote doit être accordé aux femmes et aux immigrés.
  • 10. La Vérité du 3.VIII.1934.
  • 11. A. Kriegel : le PCF sous la III° République.
  • 12. JP Joubert : Révolutionnaires de la SFIO.
  • 13. Cf. J. Kergoat : M. Pivert, socialiste de gauche.
  • 14. Guérin : Front Populaire, révolution manquée.
  • 15. Trotsky : Où va la France ?
  • 16. La lutte ouvrière, 30.X.1936.
  • 17. J. Danos, M. Gibelin : op. cit.
  • 18. Ibid.
  • 19. L. Trotsky : L'heure de la décision approche : sur la situation en France (1938).
  • 20. L. Trotsky : programme de transition.