Publié le Dimanche 9 mars 2014 à 08h34.

Il y a 40 ans, l’État franquiste assassinait Salvador Puig Antich

Le 2 mars 1974, dans la prison de Modelo à Madrid, un jeune militant anarchiste catalan de 26 ans mourait de la façon la plus épouvantable que l’on puisse imaginer, la strangulation par garrottage. Cette exécution barbare par strangulation sera la dernière de la dictature franquiste, qui allait l’année suivante disparaître avec la mort du caudillo.

Activiste du MIL (Mouvement ibérique de libération), recherché par le police, Salvador Puig Antich tomba dans un guet-apens le 25 septembre 1973. Une fusillade éclate et grièvement blessé, Salvador est arrêté et condamné à mort par strangulation quatre mois plus tard. 

Manifestations et grèves de protestationSon exécution provoquera une série de protestations dans le monde entier, notamment en France, où des manifestations à l’initiative du mouvement libertaire et de l’extrême gauche dégénèrent en affrontements avec la police. La gauche institutionnelle quant à elle s’en tiendra à des protestations de circonstance, totalement hostile aux actions armées, qu’elles soient commises en France ou sous la dictature franquiste.En Espagne, le terrorisme d’État et le souvenir encore frais de la terrible répression contre les militants anarchistes et républicains après la prise du pouvoir par Franco le 1er avril 1939, étaient là pour dissuader efficacement toute riposte de rue. La guerre civile elle-même fit plus de 400 000 victimes et autant de personnes ayant dû fuir l’Espagne et se réfugier, le plus souvent en France. On estime à 30 000 le nombre d’exécutions sommaires imputées au régime dans les mois qui suivirent la prise du pouvoir.En dépit du niveau de férocité de la répression, des grèves « d’indignation politique » se déroulèrent dans plusieurs villes, notamment à Madrid, Barcelone et Valladolid. Cette réaction ouvrière n’est pas étrangère à l’histoire même du MIL dont l’activité essentielle était, outre l’édition de brochures politiques, le financement des caisses de grève au moyen d’opérations d’« expropriation » (braquages de banque).Les militantEs du « 1000 », comme ils et elles se dénommaient par autodérision, se revendiquaient de l’anarchisme, du conseillisme ou encore du situationnisme, et entretenaient des liens fraternels avec leurs camarades français, nombreux à l’époque dans la région toulousaine. Dans le foisonnement idéologique de l’après Mai 68, et de la sensibilisation à l’internationalisme de toute une génération militante, la survivance d’une dictature sanglante à nos frontières devenait insupportable.

L’extrême droite française, fidèle soutien de la dictatureFervents défenseurs de l’Espagne fasciste, l’extrême droite française et le tout récent Front national applaudirent l’assassinat de Salvador Puig Antich, comme un an plus tard pour l’exécution de 5 militants du FRAP, comme encore quelques années plus tard en se réjouissant des assassinats commis au Pays basque nord, par le GAL (Groupe anti­terroriste de libération)... Ses liens avec le régime franquiste étaient très anciens, et Jean-Marie Le Pen ne les a jamais reniés. N’oublions pas que c’est à Madrid même que le 11 février 1961 s’était constituée l’OAS qui allait semer la terreur en Algérie et sur le territoire français. Une solide amitié unissait le fondateur du Front national au fondateur de la Phalange, puis de Fuerza nueva, Blas Pinar, jusqu’à la mort de ce dernier il y a quelques mois.Ces liens politiques continuent aujourd’hui. Ainsi, Manuel Andrino, actuel chef de la Phalange déclarait le 17 avril 2009 « nous sommes unis par des liens fraternels avec le Front national français ». Les faits sont têtus, et la tentative de dédiabolisation du F Haine se heurtera toujours à la réalité historique, entre autres ses liens politiques historiques avec le fascisme international.Les antifascistes ne manqueront jamais une occasion de mettre sur la place publique ces éléments du passé, qui nous éclairent sur le présent et sur l’avenir enchanteur que nous promettent les fascistes, fussent-ils drapés dans les habits neufs de la démocratie.

Alain Pojolat