Le 12 octobre, la loi Besson qui aggrave la situation des étrangers en France était votée à l’Assemblée.Après avoir réussi la mobilisation du 4 septembre, le collectif Contre la xénophobie et la politique du pilori, a prévu des manifestations dans toute la France le 16 septembre, alors qu’est débattue la loi Besson au Parlement. La mobilisation sur les retraites et la décision de l’Intersyndicale d’organiser des manifestations le même jour, l’ont conduit à converger avec les cortèges syndicaux ou à organiser, comme à Paris, un rassemblement à leur passage. Cela n’a rien d’artificiel. Ce qui est à l’ordre du jour est bien une mobilisation d’ampleur contre un gouvernement qui manie la démagogie raciste à seule fin d’imposer à tous une régression sociale et démocratique historique. Loi Woerth et loi Besson, même combat. Rien n’est plus faux que l’affirmation de Besson présentant son projet comme une simple transposition de la directive européenne « retour », la fameuse « directive de la honte ». Les dispositions vont bien plus loin et dessinent pour les étrangers de véritables régimes d’exception. Si la directive sert de prétexte pour allonger la rétention administrative de 32 à 45 jours, le projet Besson en rajoute : il supprime le droit pour un étranger de faire annuler une mesure illégale en neutralisant l’action du juge des libertés et de la détention (JLD). Celui-ci ne pourra intervenir qu’au bout de cinq jours, après le tribunal administratif et avec des pouvoirs réduits. Les zones d’attentes, ces espaces dans les aéroports, ports et gares internationales dans lesquels les étrangers arrivant en France sont censés ne pas y être encore entrés, deviendront une sorte d’épée de Damoclès qui les suivra partout. « La zone d’attente s’étend du lieu de découverte des intéressés jusqu’au point de passage familier le plus proche », dit le projet. C’est que Besson a la rancune tenace. On se souvient du désaveu que lui avaient infligé les juges en libérant les Kurdes découverts sur les côtes corses en janvier dernier. L’« interdiction de retour », véritable bannissement pour deux à cinq ans, pourra être prise en même temps qu’une OQTF. Elle est certes directement inspirée de la directive européenne, mais les quelques protections qui figuraient dans cette dernière sont absentes du projet. Les étrangers malades ne seront plus régularisés, puisqu’ils devront prouver « l’indisponibilité » du traitement nécessaire et non plus le non-accès effectif. S’il existe, mais à un prix prohibitif, l’étranger ira mourir chez lui. Besson durcit les peines contre les mariages « gris » : sept ans de prison et 30 000 euros d’amende frapperont l’étranger accusé d’avoir trompé son conjoint français sur ses sentiments. Les mariages mixtes sont forcément suspectés de mariage d’intérêt. Dans les autres cas, on ne met pas en doute par exemple la sincérité des sentiments de la nouvelle Mme Besson. Cela ne nous regarde pas et, franchement, on s’en fout ! Mais quand l’un des mariés est étranger, l’État s’arroge le droit de sonder les cœurs… des étrangers. Évidemment, si un Français décide de faire d’une étrangère sa boniche ou son esclave sexuelle, le projet Besson ne trouve rien à redire et même aggrave la situation : l’époux disposera d’un moyen de chantage supplémentaire en menaçant de dénoncer un mariage « gris ». L’extension de la déchéance de la nationalité est réservée par le projet aux Français naturalisés depuis moins de dix ans et condamnés pour meurtre d’agents dépositaires de l’autorité publique. Mais sa signification est plus vaste : elle officialise l’existence de sous-citoyens, de « Français de papier » juridiquement distincts des Français « de souche ». Tout permet de penser que cette mesure, inédite depuis Vichy, ouvre la voie à un élargissement futur des cas de déchéance. Le discours de Grenoble le 30 juillet dernier a donné le ton du projet Besson, lorsque Sarkozy a prétendu vouloir « poser les questions sans tabou ». La droite décomplexée n’affiche pas seulement le fric décomplexé, avec le yacht de Bolloré, le Fouquet’s et les faveurs de Mme Bettencourt : comme avec le « débat » sur l’identité nationale, la rupture sarkoziste mobilise aussi un racisme décomplexé. Opposons au projet de loi Besson un antiracisme décomplexé ! Emmanuel Sieglmann