Publié le Mercredi 11 septembre 2024 à 19h00.

Meurtres dans la Manche : plus que jamais ouvrir les frontières

Le 3 septembre, au large de Wimereux, le bateau dans lequel s’étaient embarquées 65 personnes s’est disloqué provoquant un naufrage tragique. Deux personnes sont disparues et 12 sont décédées. Ce chiffre est hélas encore provisoire car plusieurs autres sont grièvement blessées. La moitié des passagerEs dont de nombreuses jeunes femmes étaient mineurEs. Cette année, 43 personnes se sont déjà noyées en tentant de rejoindre les côtes anglaises.

Darmanin, n’écoutant que sa grande humanité, s’est rendu sur place et a déclaré sans honte qu’il avait « une pensée extrêmement émue pour ces personnes qui cherchaient un monde meilleur ». Devant tant de cynisme, d’hypocrisie, de lâcheté, plus que jamais nous sommes déterminéEs à lutter pour en finir avec ces politiques migratoires meurtrières.

Des frontières qui tuent

N’étant plus membre de l’Union européenne, la Grande-Bretagne n’est donc pas signataire du Pacte européen sur la migration et l’asile adopté en mai 2024. Il faut rappeler la dangerosité de ce texte qui renforce encore les frontières de l’UE par l’organisation d’un filtrage aux frontières, la création de centres de rétention administrative (CRA) dans les zones frontalières pouvant embastiller 30 000 personnes, permettant le renvoi rapide de migrantEs, sans possibilité d’entrée dans l’UE et de dépôt d’une demande d’asile, le renforcement en matériel de sécurité et personnels de Frontex. La liste des données personnelles pouvant être collectées est étendue et concerne aujourd’hui les enfants à partir de 6 ans. Conséquence : quasi impossibilité d’entrer dans un pays de l’UE et même de réessayer ! 

La France et le Royaume-Uni unis dans la chasse aux migrantEs 

L’accord sur la politique migratoire, signé à Calais en novembre 2022, se nomme officiellement « accord sécuritaire ». Les deux ministres de l’Intérieur en fonction à cette date, Darmanin et Braverman, ont annoncé la couleur : « l’objectif est de rendre la route des embarcations de fortune non viable ». Pour cela, les grands moyens sont employés : le Royaume-Uni verse à la France une aide financière conséquente et en constante augmentation : 72,2 millions en 2022-2023 et jusqu’à 209 millions en 2025-2026. Cette manne a déjà servi à financer 40 % de postes supplémentaires de policiers et gendarmes sur les plages de la Manche, des chiens de détection, l’augmentation du nombre de drones et de caméras, la mise en chantier d’un nouveau CRA. En projet la création de camps d’internement dans le sud de la France pour les migrantEs arrivant de la Méditerranée et ayant le projet de rejoindre le Royaume-Uni. 

Cet accord inique est dans la droite ligne des politiques migratoires réactionnaires dans chacun des deux pays. Pendant vingt ans, le parti conservateur britannique a fait du contrôle de l’immigration sa priorité, 120 000 dossiers de demandes d’asile ne sont pas traités, la politique du tout sécuritaire a fait le lit du racisme antimusulman, carburant essentiel des récentes émeutes d’extrême droite. Et même si Keir Starmer a stoppé le projet fou d’expulsion des migrantEs vers le Rwanda, il a quand même promis d’augmenter le nombre de déboutéEs vers leur pays d’origine ! En France, on le voit, la loi Darmanin s’applique complètement.

Une seule réponse : solidarité et unité !

De vives et belles réactions sur le terrain sont en cours. Marche d’hommage aux migrantEs au Havre, procession vers la mer, journée de protestation au Tréport fin septembre, actions à Dieppe, Ouistreham, Caen. C’est la première fois qu’une telle solidarité s’exprime sur un large appel, avec notamment des groupes cathos, la Fasti, la LDH, les UL CGT et CFDT !

Victorine Laforge