Lors de la réunion où plusieurs organisations ont décidé d’appeler à aller à Bastille le 22 novembre en solidarité avec les migrantEs, malgré l’interdiction de manifester, Ali est intervenu. « Nous n’avons pas le choix, nous migrants, réfugiés. Nous nous battons pour la justice et pour nos droits. Certains sont dans des parcs, dans le froid. Depuis des mois la police nous pousse, nous revenons. Ce dont nous avons besoin c’est que vous soyez avec nous. »
L’état d’urgence a, particulièrement, mis un couvercle sur la situation des migrantEs, sans-papiers et réfugiés. Les migrantEs sont à nouveau invisibles. Ceux et celles qui sont à la rue sont plus isoléEs que jamais par la présence militaire et policière et l’interdiction des rassemblements. Des milliers sont dans des centres d’hébergement suite aux luttes des derniers mois. Pour combien de temps ? Dans certains endroits, les conditions sont de plus en plus difficiles, pas de nourriture, pas de tickets de transport pour ceux qui sont loin de Paris. Le cahier des charges des associations qui gèrent les centres est rarement respecté. Ceux qui ne peuvent demander le droit d’asile vont être remis à la rue. L’accès plus difficile au processus depuis la réforme durcit la situation.
L’accueil des migrants n’avait jamais commencé en France. Manuel Valls a signifié que ça allait être encore pire. Dans un entretien avec des journaux européens il a déclaré que « L’Europe ne peut pas accueillir plus de réfugiés ». Pour justifier cela il a multiplié les amalgames sur des « terroristes » qui passeraient en Europe par la filière des réfugiés et sur l’islam parce que « tout cela est né au sein de l’islam ».
Plus que jamais, développer la solidarité
Dans ces conditions le soutien aux migrantEs est plus que jamais nécessaire. On voit, avec l’état d’urgence, combien le système des frontières se resserre sur toute la société. Le projet d’une assemblée de migrantEs, réunissant des migrantEs des différents centres et des migrantEs qui sont à la rue, avec des sans-papiers, est en préparation pour combattre la fragmentation actuelle et leur permettre de se redonner une visibilité. Pour beaucoup, la question de la régularisation se pose plus concrètement au-delà de celle de l’hébergement. Ouverture vers une convergence plus aisée avec le mouvement des sans-papiers.
Mais il faut aussi reprendre le chemin de la rue. Il faudra une échéance en décembre. En perspective, à l’initiative des mouvements en Grèce et en Turquie, se prépare un week-end de mobilisation les 23 et 24 janvier contre la fermeture des frontières, avec des manifestations à la frontière entre la Grèce et la Turquie. Ce pourrait être l’occasion d’une mobilisation du même type à Calais et Vintimille. La coalition antiraciste et antifasciste grecque appelle par ailleurs à une journée internationale de mobilisation le 19 mars. En solidarité avec les migrantEs, contre le racisme et le fascisme, cette échéance pourrait porter aussi le lien entre le système des frontières et la guerre. Ce sera en effet l’anniversaire de l’occupation de l’Irak en 2003...
Denis Godard