Publié le Mardi 2 novembre 2021 à 11h58.

Zemmour en Bretagne : résistance antifasciste !

Contraint d’annuler sa venue à Vannes, le vrai-faux candidat à la présidentielle a bel et bien tenu meeting à Pleurtuit (près de Saint-Malo) et à Nantes. Ces interventions, devant des salles pleines de spectateurs payants, ne se sont pas déroulées sans accroc : à Nantes, comme à Pleurtuit, des centaines de manifestantEs ont crié leur rejet de Zemmour, en tant que propagandiste de l’ « Autoritarisme, antisémitisme, racisme, homophobie, sexisme hallucinants fondés sur des fantasmes et des mensonges, Eric Zemmour c’est l’extrême-droite décomplexée, une tentation fasciste assumée au service des ultrariches. »1

Zemmour : recyclerie de l’extrême-droite !

A Pleurtuit, ils avancent (à peine) masqués, planqués derrière la fiction d’une réunion culturelle organisée par deux associations. « Mémoire du futur », d’une part, à la tête de laquelle se trouve Reynald Sécher, promoteur de la théorie selon laquelle les troupes républicaines se seraient livrées à un génocide à l’encontre de l’insurrection vendéenne de 1793. On retrouve ce monsieur très actif lors du mouvement « la manif pour tous » ou comme intervenant dans les actions du mouvement catholique intégriste Civitas (aujourd’hui parti politique d’extrême-droite), ou dans les conférences de l’Action française à Rennes en 2020... « L’Alliance Souverainiste de l’Estuaire de la Rance »,(ASER) d’autre part, créée en août 2020 par des militants de droite du pays malouin dont certains sont des transfuges du Rassemblement National tandis que d’autres affirment ouvertement leurs sympathies identitaires, c’est-à-dire néo-nazies2.

Par ailleurs, dans un article récent, Médiapart3 fait état d’une mystérieuse réunion estivale regroupant une sorte de pré-comité de campagne qui se serait tenue dans le Finistère en juillet, regroupant une « trentaine de participants (qui) se compose de trois ex-soutiens du général Antoine Martinez (signataire de la tribune des militaires), mais surtout d’anciens militants ou élus du MNR4 ».

Pleurtuit : 400, dans l’unité5

Partie d’un groupe d’habitantEs de Pleurtuit, relayée par la coordination malouine « Le Monde d’après » (dont le NPA est membre), l’initiative a rassemblé un large arc de forces associatives, syndicales et politiques. Et c’est près de 400 personnes, en grande partie de Pleurtuit et du pays Saint-Malo - Dinan qui se sont mobilisées (...) pour dire « Non au monde de Zemmour ».

Après une intervention sur la place de la Mairie des habitantEs de Pleurtuit [avec la lecture (d’un) beau texte de Guizmo - chanteur du groupe Tryo] et de la coordination malouine « Le monde d’après », plusieurs personnes ont pu exprimer les raisons de leur rejet des idées distillées par Zemmour.

Après dislocation du rassemblement, tout le monde s’est déplacé vers la salle Delta ou pérorait Zemmour, à l’abri de ses sbires... et des gendarmes mobiles. Là de nombreux slogans antiracistes et antifascistes ont été repris, ainsi d’ailleurs que des chansons de la même veine. Cette saine réaction populaire et unitaire, dans ce territoire où les idées progressistes ont du mal à s’imposer, montre qu’il y a une grande marge entre ce que veulent nous infuser les sondeurs et les réalités politiques de terrain. Et ce n’est qu’un début... T’inquiète pas Zemmour, ta tournée bretonne ne va pas être une promenade de santé !

Nantes, environ 1200 mais en deux rassemblements.

S’il n’a pas été question à Nantes d’aboutir à une initiative commune, plusieurs expressions du rejet de la vraie fausse campagne de Zemmour sont apparues. D’une part, un texte, cité plus haut, des partis politiques EELV, Ensemble, NPA, GDS, et même le PS (!). Mais ce texte en est resté à une déclaration, n’appelant à rien. D’autre part, un appel de Solidaires 44 : dénonçant « l’extrême droite (qui) est une machine à exclure, à diviser et à casser les acquis sociaux » et appelant à « s’organiser contre la montée des fascismes et des racismes pour défendre une autre vision de la société ». Solidaires 44, de son côté, appelait à un rassemblement à 14 h, au miroir d’eau à Nantes. Ce rassemblement de 500 personnes s’est terminé par la prise d’un bâtiment, un ancien FJT, proclamé nouvelle Maison du peuple (avec Attac, Greenpeace Nantes, le collectif Travailler moins, et une trentaine d’associations), suite à l’expulsion des occupants, le 28 juillet 2021, de la première version de la Maison du peuple, l’ancien collège Notre-Dame-du-Bon-Conseil, qui accueillait associations, sans-abris et migrants.6

Un peu plus tard, ce sont 700 personnes (650 selon la préfecture !) qui se sont rassemblées à l’appel de Nantes révoltée (relayé par le NPA et beaucoup d’autres) aux abords du Zénith où devait parader Zemmour, devant 1 400 personnes, ce qui n’est pas énorme pour Nantes (le Zénith peut accueillir plus de 5 000 personnes). Comme à Pleurtuit, la réunion s’est tenue sous la protection des Gendarmes Mobiles, les actions des antifas les plus résoluEs ayant même abouti au report de sa prise de parole

Antifa, anti-Zemmour, tant qu’il le faudra !

On le voit, plus ou moins spontanément, les réseaux militants, nos réseaux, notre camp social se mobilise contre le triste sire qui hante les plateaux télé, et dont les médias ont fait une sinistre marionnette aux relents racistes et carrément fascistes. Restera à avancer sur deux questions : comment unifier un tel mouvement, indispensable pour contrer ce phénomène politico médiatique qui a de quoi nous inquiéter (Trump, Bolsonaro, l’extrême droite italienne, autant de précédents auxquels réfléchir), et sur quelles bases ? A Pleurtuit7, cela a été l’occasion d’échanges entre militant.es de gauche sur l’argumentaire pour mobiliser et déconstruire les discours de l’extrême-droite. Certains estiment ainsi qu’il faut s’opposer aux idées de ce courant au motif qu’elles sont incompatibles avec les « valeurs de la République garanties par la Constitution». Même si, au final, le NPA a signé le texte car ce qui nous importait le plus, en la circonstance, c’était de réaliser un large et unitaire front contre l’extrême-droite, nous ne pensons pas c’est en s’appuyant sur les « valeurs de la République » que l’on fera reculer les idées d’extrême-droite. L’expérience historique nous montre en effet que la République (bourgeoise) est - selon les circonstances - capable de s’asseoir sur les principes qu’elle proclame (par exemple le 17 octobre 1961) qu’ils soient ou non inscrits dans la constitution. Non, la seule manière de lutter efficacement contre la propagation de ces idées néfastes, c’est de préparer une alternative radicale, sociale, au système qui sécrète ces idées. C’est à dire préparer le remplacement du capitalisme par une société fraternelle, égalitaire, qui ne sera plus dominée par la course au profit.

  • 1. Déclaration unitaire des organisations politiques nantaises, dont le NPA.
  • 2. Source Rouge Emeraude, bulletin du NPA Saint-Malo ; http://www.anticapitaliste-35.org/
  • 3. https://www.mediapart.fr/journal/france/301021/en-coulisses-les-ex-lieutenants-de-bruno-megret-s-activent-pour-la-campagne-zemmour
  • 4. Scission du FN, en 1999, avec Bruno Mégret.
  • 5. Source ; facebook NPA Saint-Malo ; https://www.facebook.com/NpaSaintMalo?fref=ts
  • 6. Bâtiment évacué par l’intervention de la Police dès le lendemain.
  • 7. Source Rouge Emeraude, bulletin du NPA Saint-Malo ; http://www.anticapitaliste-35.org/