Publié le Mercredi 21 octobre 2020 à 12h54.

La septième croix, d’Anna Seghers

Métaillé, 448 pages, 22 euros.

Anna Seghers, écrivain connue et membre du Parti communiste allemand, doit s’exiler avec l’arrivée de Hitler au pouvoir. Elle réussit à quitter la France et rallie le Mexique où la Septième Croix sera publié en 1942.

Sept évadés

Le roman raconte l’évasion de sept prisonniers d’un camp de concentration baptisé Westhofen sur le Rhin. Ils se séparent immédiatement. Quatre d’entre eux sont repris. Un cinquième choisit de se rendre. Un sixième meurt en atteignant son village. Seul le septième, Georg Heisler, réussira son évasion et ne sera donc pas exhibé sur les croix que le commandant du camp a fait ériger.

Le livre, fertile en rebondissements, est conçu comme un roman policier : on suit la fuite de chacun des sept évadés et, surtout, l’errance de Heisler qui essaie de se raccrocher à ses anciennes connaissances pour avoir de l’aide. Avec prudence car l’environnement est incertain : la Gestapo se livre à des investigations minutieuses qui vont bien au-delà des relations politiques que les évadés ont pu avoir. Heisler est animé d’une rage de vivre et Wallau, le plus aguerri des sept (qui sera cependant repris), lui a communiqué dans le camp sa capacité de réflexion. Il survivra donc grâce à une combinaison de solidarité amicale et militante.

« Roman de l’Allemagne hitlérienne »

Au-delà du personnage de Heisler, le livre est une collection de portraits d’individus, hommes et femmes, confrontés à un système conçu pour broyer toute résistance : certains se révèlent mesquins, d’autres héroïques, d’autres enfin craquent. Par ailleurs, des relations amicales ou amoureuses subsistent ou se nouent. C’est un « roman de l’Allemagne hitlérienne » ainsi que le précise le sous-titre. Pour la masse de la population, la vie continue mais il est important de ne pas se faire remarquer, y compris dans la vie quotidienne et familiale : les dénonciations sont toujours possibles. Quant aux anciens militants qui ont échappé aux arrestations ou ont été libérés, ils essaient de se faire oublier et, pour ceux qui sont encore plus ou moins actifs, n’ont guère de liaisons entre eux.

Il ne faut pas attendre du livre la moindre analyse politique sur le PC allemand et sa politique face à la montée du nazisme : ce n’est pas son propos et Anna Seghers, tout en étant une des écrivains allemands majeurs du 20e siècle, s’abstiendra, jusqu’à la fin de sa vie en RDA (Allemagne de l’Est), de la moindre critique publique de la direction du parti.