Publié le Mercredi 10 février 2021 à 10h18.

« Affaire du siècle » : l’État condamné pour inaction climatique

Ne boudons pas notre plaisir. La condamnation de l’État par le tribunal administratif de Paris le 3 février pour « carence fautive » est une première victoire non seulement pour pour les 4 associations – Oxfam, Greenpeace, Fondation Hulot, Notre affaire à tous – et les 2,3 millions de personnes qui les ont soutenues mais, au-delà, pour toutes celles et tous ceux qui se battent pour le climat.

En accordant l’euro symbolique pour préjudice moral aux associations, le tribunal reconnaît que l’État a commis une faute, celle de n’avoir pas « réalisé les actions qu’il avait lui-même reconnues comme étant susceptibles de réduire les émissions de gaz à effet de serre ». Il reconnaît aussi l’existence d’un préjudice écologique, même s’il refuse le versement de l’euro symbolique pour une raison que nous pouvons partager : la réparation de ce préjudice doit d’abord être assurée en nature et ne peut être réduite à un euro.

Toute victoire symbolique est bonne à prendre

Mais ce n’est qu’un premier pas car les associations demandent aussi, et surtout, au tribunal d’enjoindre le gouvernement à agir et à : « prendre les mesures nécessaires aux fins de réduire les émissions de gaz à effet de serre » à un niveau compatible avec l’objectif de contenir l’élévation de la température moyenne de la planète en dessous du seuil de 1,5 °C en tenant compte de la responsabilité particulière des pays développés ; « atteindre les objectifs de la France en matière de développement des énergies renouvelables et d’augmentation de l’efficacité énergétique » ; « adapter le territoire national aux effets du changement climatique » ; « assurer la protection de la vie et de la santé des citoyens contre les risques liés au changement climatique ».

Sur ces quatre requêtes visant à ordonner au gouvernement d’agir « afin de faire cesser pour l’avenir l’aggravation du préjudice écologique constaté », le tribunal ordonne un supplément d’instruction afin de soumettre les observations non communiquées des ministres compétents à l’ensemble des parties, dans un délai de deux mois. S’il y a peu de chance, pour des raisons de forme (limite du pouvoir des juges) et de fond, que le gouvernement soit effectivement contraint d’agir, toute victoire même symbolique est néanmoins très importante. Les déclarations fumeuses de Macron en matière d’écologie auront encore plus de mal à masquer l’inaction totale pour contenir le réchauffement du climat sous les 1,5 °C. Ce n’est pas le projet de loi « climat et résilience », qui devait être présenté au conseil des ministres le 10 février, qui va inverser la tendance. Macron s’était engagé « sur l’honneur » à reprendre « sans filtre » les propositions de la Convention citoyenne… Résultat : une vraie mascarade !

L’urgence climatique résonne avec les urgences écologique et sociale et impose des actes forts que le gouvernement Macron, au service des impératifs économiques du profit, est incapable de prendre.

Continuons de nous faire entendre partout, contre les projets climaticides (fermes-usines, autoroutes, déforestation, permis d’extraction et subventions aux énergies fossiles...). Cette première victoire en appelle d’autres. Elle doit surtout nous encourager à reprendre le chemin des mobilisations massives pour le climat dès le 19 mars avec l’appel de Friday For Future, Youth For Climate… et au-delà, autour de la COP26, qui se tiendra en novembre 2021 à Glasgow