Publié le Vendredi 16 juillet 2021 à 14h51.

Le climat, la vie, nos vies, pas le profit !

La 26e COP sur le Climat se réunira du 1er au 12 novembre. Les représentantEs des gouvernements et institutions internationales feront de belles déclarations pour sauver le climat. Mais les véritables héros et héroïnes de la lutte contre le dérèglement climatique, ce ne sont pas les dirigeantEs des pays et des groupes capitalistes qui se sont réunis à Glasgow, dont la majorité a une responsabilité directe dans le désastre climatique imminent qui menace l’humanité. Ce sont les centaines de militantEs, de représentantEs des peuples indigènes qui défendent la terre et l’environnement contre les projets extractivistes et destructeurs et qui ont été arrêtéEs, harceléEs, torturéEs voire assassinéEs en Colombie, aux Philippines, au Brésil, au Honduras, en Inde, au Kenya, au Maroc, en Égypte ou au Nicaragua… par ou avec la complicité de ceux qui iront parader devant les caméras.

Les peuples, les femmes, les jeunes qui s’opposent à la destruction de la forêt, à l’accaparement des terres, à l’appropriation de l’eau, à la pollution de l’air et des sols, que ce soit à cause de l’industrie minière ou à cause de l’agriculture et l’élevage industriels, agissent pour l’humanité entière contre le changement climatique et pour sauver la biodiversité en affrontant les multinationales et les États.

Le grand défi environnemental

Malgré toutes les conférences et accords internationaux des dernières décennies, les processus de dévastation des conditions qui rendent la vie possible sur la planète Terre, continuent d’avancer à un rythme accéléré : réduction incessante de la diversité biologique, dynamique de la déforestation, pollution de l’air, de l’eau et des terres, surpêche et monocultures transgéniques, réchauffement climatique… Il reste très peu de temps pour éviter des transformations non seulement catastrophiques mais irréversibles.

Où en est le climat ?

Le ralentissement de l’économie a fait baisser les émissions de CO2 (jusqu’à – 17 % certains jours et entre 4,2 et 7,5 % sur l’année 2020), mais n’a pas empêché l’année 2020 d’être la plus chaude jamais enregistrée avec 1,25 °C au-dessus de la période pré-industrielle. Surtout, il n’a pas réduit la concentration de CO2 dans l’atmosphère – qui est le résultat cumulé des émissions passées et présentes. Bien que les émissions de 2020 aient été inférieures à celles de 2019, elles sont toujours bien supérieures à ce que les puits de carbone (terre et mer) peuvent absorber. On estime qu’environ 45 % des émissions finissent dans l’atmosphère. Par conséquent, la concentration de CO2 dans l’atmosphère devrait augmenter d’environ 2,5 parties par million d’ici 2020. Les limites de l’accord de Paris de 2015 (augmentation de la température de 1,5 °C) sont toujours menacées et ne pourront être atteintes au début des années 2030 sans changement profond dans l’économie mondiale et le métabolisme de la société humaine et de la planète.

Les catastrophes sont déjà là – fonte de la banquise, canicules exceptionnelles, ouragans, inondations, méga-feux… – mais le pire est à venir et le bouleversement de nos vies par la pandémie n’en est qu’un maigre aperçu. Il n’y a pas le temps pour des demi-mesures, il faut agir immédiatement et radicalement en respectant la justice sociale et climatique.

Le Covid-19 annonce les crises écologiques à venir et met en accusation le système

La pandémie de Covid-19 a tué plus de trois millions de personnes, profondément perturbé nos vies, exacerbé les inégalités sociales Nord-Sud et à l’intérieur des pays, dans l’accès aux soins et aux vaccins comme dans la possibilité de se protéger ; elle a aggravé le chômage et la pauvreté, exposé et épuisé toutes celles qui prennent soin, soignent, nourrissent, nettoient, éduquent. Du côté des gouvernements, alors que leurs politiques de destruction des services publics de santé n’ont laissé d’autre choix que la mise à l’arrêt de toute vie sociale, ils en ont profité pour renforcer les politiques autoritaires et la répression. Quant aux groupes capitalistes, en particulier les industries du numérique et pharmaceutiques, leurs profits ont explosé.

Il n’y a pas à choisir entre combattre la pandémie et sauver le climat

La maladie de la Covid, comme de nombreuses autres, passée d’animaux sauvages aux humains, met en lumière notre interdépendance avec la nature dont nous faisons partie. La façon dont nous habitons le monde est ravagée par la logique du profit du capitalisme qui génère l’industrie de la viande et ses élevages concentrationnaires, le trafic des espèces sauvages, les monocultures de l’agriculture industrielle, la déforestation et l’extractivisme qui détruisent les écosystèmes et favorisent les pandémies. Cette logique est aussi responsable de l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre, cause du changement climatique. À l’opposé des gouvernements qui cherchent à utiliser la crise sanitaire et ses implications économiques et sociales pour reléguer la question environnementale et l’urgence climatique au second plan, nous soutenons l’appel à « un rétablissement juste », qui met la question environnementale et sociale au centre de toutes les politiques publiques.

Qu’attendre de la COP26 ?

Les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre – États-Unis, Union européenne et Chine – se déclarent tous d’accord pour viser la neutralité carbone, en 2050 pour les deux premiers, et en 2060 pour la Chine. Joe Biden signe le retour des États-Unis dans l’accord de Paris et organise un « sommet de la dernière chance », Xi Jinping déclare que la Chine commencera à baisser ses émissions de CO2 avant 2030, l’Union européenne relève de 40 % à 55 % son objectif de réduction en 2030… Le blocage explicite des climato-négationnistes perd du terrain et les États sont appelés à « revoir à la hausse leurs ambitions ». Impossible effectivement d’ignorer le gouffre qui sépare l’objectif fixé lors de la COP21 en 2015 à Paris de « maintenir le réchauffement bien au-dessous de 2 °C tout en continuant les efforts pour ne pas dépasser 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle » et les engagements actuels des États qui conduisent à un réchauffement de 3,3 °C d’ici la fin du siècle. Mais derrière les déclarations d’intention, se cachent toujours le cynisme des capitalistes et des gouvernements à leur service, et l’absence de toute décision réelle et radicale pour sortir des énergies fossiles.

La neutralité carbone en 2050 : une fausse bonne nouvelle impérialiste et périlleuse

Zéro émission nette, cela ne signifie pas zéro émission. « Nette » signifie continuer les émissions, en poursuivant l’exploitation des énergies fossiles, et prétendre les annuler par des absorptions dites « émissions négatives » : technologies hasardeuses comme la capture-séquestration du CO2 ; mécanismes faisant supporter au Sud global le poids de la compensation des GES émis par et pour les plus riches en expropriant les peuples de leurs terres et forêts, dans un néocolonialisme vert qui tourne le dos à la reconnaissance des responsabilités historiques des pays du Nord. L’intensification de l’extractivisme, justifié hypocritement par le besoin de matériaux pour ces technologies prétendument vertes, est une réelle menace.

Viser 2050, c’est refuser d’agir dès maintenant

C’est décider de laisser les gaz à effet de serre s’accumuler et réchauffer le climat. Pire, cette échéance éloignée laisse d’ici là la porte ouverte à un « dépassement temporaire » des 1,5 °C, compensé par un plus qu’hypothétique refroidissement. Quand bien même ce refroidissement serait possible, un tel pari fait fi des basculements irréversibles qui risquent d’être causés par le dépassement temporaire. Le GIEC situe par exemple le point de bascule de la calotte glaciaire du Groenland entre 1,5 et 2 °C, si celui-ci est franchi aucun refroidissement à posteriori ne permettra de revenir en arrière.

Les négociations internationales restent préemptées par les grands groupes financiers et industriels et dominées par les impératifs capitalistes et impérialistes. On ne peut en attendre ni l’adoption de mesures à la hauteur de l’urgence ni le respect de la justice sociale et climatique à l’égard des pays du Sud et de leurs peuples.

 

 

« La solution ne viendra pas de ces négociations, elle ne peut venir que des luttes des peuples » (Greta Thumberg)

La COP26 doit être l’occasion de défier les dirigeants, de les discréditer en mettant à nu leurs mensonges, de les déstabiliser politiquement par la puissance de nos mobilisations, de reprendre le pouvoir en mettant en avant nos propres solutions pour la justice sociale et climatique.

Nos exigences doivent inclure :

• Des plans de réduction des émissions dans les différents secteurs : transport, bâtiment, énergie et agriculture, pour rester en dessous des 1,5 °C, avec l’implication directe des travailleuses et travailleurs concernés et des communautés impactées, de la conception à la réalisation de solutions alternatives.

• L’arrêt de la destruction des habitats, y compris la déforestation, l’assèchement des zones humides, les nouvelles activités de forage et d’exploitation minière et la pollution des océans.

• La fin de l’agriculture et de la pêche industrialisées et intensifiées. 60 % de la perte de biodiversité mondiale est directement due à l’agrobusiness et aux grandes pêcheries. Le secteur de l’élevage et de l’agriculture de l’Amazonie brésilienne, qui dépend du commerce international du bœuf et du cuir, est responsable d’environ 80 % de la déforestation dans la région, soit environ 14 % de la déforestation annuelle totale dans le monde.

• Le rejet de la privatisation du commun par le marché « vert ».

• La fin des « marchés humides » qui font le commerce d’animaux sauvages et d’espèces menacées.

• La souveraineté alimentaire et une forte réduction de la consommation de viande. Aujourd’hui, 70 milliards d’animaux sont abattus chaque année pour la consommation humaine. Ce chiffre devrait doubler d’ici 2050. L’élevage industriel consomme de vastes quantités de ressources (sols, énergie, produits agricoles) qui pourraient être utilisées (ou non), de manière beaucoup plus efficace, par la population humaine.

• L’inversion de la tendance à l’urbanisation, pour penser autrement l’occupation de l’espace.

• La réduction de la production matérielle et des transports inutiles.

• Une réduction massive des transports. La propagation rapide du virus est également due à un système de mobilité mondiale non durable. Pas de retour au transport aérien de masse.

• La lutte contre les technologies dangereuses (nucléaire, OGM, géo-ingénierie, bioénergie avec captage et stockage de dioxyde de carbone BECCS).

• Un passage complet aux énergies renouvelables : éolienne, solaire, marémotrice et géothermique, sans composante nucléaire.

• La fin des mécanismes de compensation et le respect des peuples du Sud global et en particulier les peuples indigènes.

 

Sauvons le climat des 99 %, au 1 % de payer !