L’Europe était dans une situation de blocage sur les OGM depuis 14 ans : pas de majorité qualifiée pour les interdire complètement ni pour les autoriser... Résultat, il n’y avait qu’une seule PGM (plante génétiquement modifiée) cultivée en Europe, le maïs MON 810 de Monsanto, pour la plus grande partie en Espagne. Jean-Claude Juncker a décidé de passer outre et, en trois actes, il a de facto remis en selle les OGM.
Le 13 janvier dernier, le Parlement européen accorde aux États le droit d’interdire la culture d’un OGM sur leur territoire. Sous des airs de subsidiarité et de pouvoir redonné aux États membres, les grandes gagnantes sont en fait les entreprises de biotechnologie. Le pouvoir donné aux États est en fait très limité, puisqu’ils devront négocier avec les firmes semencières des critères utilisés pour interdire une PGM. De plus ils seront à la merci d’attaques juridiques (concurrence, libre échange…) que ce soit dans le cadre de l’OMC ou du futur Tafta.Le 22 avril, la Commission européenne annonce qu’elle veut réviser les règles d’importation des OGM. Et elle propose le même système que pour les semences. Avec évidemment les mêmes conséquences, les États qui prendront le risque d’interdire un OGM seront poursuivis par les entreprises commercialisant ces OGM. Celles-ci seront sûres de gagner puisque l’Europe est bâtie sur le principe de libre circulation des marchandises. De plus, même si une interdiction était prise et n’était pas contestée, elle serait sans effet. Comment contrôler qu’un plat préparé produit aux Pays-Bas avec des ingrédients provenant de plusieurs pays ne contient pas un soja OGM ? Même si c’est possible techniquement, les États n’ont ni les moyens ni l’ambition de mener à bien ces tests sur les milliers d’aliments importés.
19 nouveaux OGM autorisés !Deux jours plus tard, le 24 avril, la Commission européenne enfonce le clou en renouvelant l’autorisation de 7 OGM et en donnant une autorisation à 10 OGM, tous destinés à l’alimentation humaine ou animale. Sont autorisés du maïs, du soja, du colza et du coton. Pour le maïs, il s’agit uniquement d’alimentation animale, mais pour les autres les deux usages sont possibles : les préparations à base de soja (lait de soja, tofu, etc.), l’huile de colza couramment utilisée en cuisine industrielle, le coton dont on ne se contente pas d’en faire des vêtements, puisque son huile est aussi utilisée en alimentation.Dans la plupart de ces OGM, les firmes biotechnologiques ont introduit deux ou trois gènes. Incontournable, le gène de résistance au glyphosate, un herbicide systémique plus connu sous son nom commercial, le Roundup de Monsanto. Ce même produit qui vient d’être déclaré comme cancérogène probable (dernière catégorie avant cancérogène certain) par le Centre International de recherche sur le cancer (qui dépend de l’OMS)... Les plantes qui portent ce gène sont imbibées de Roundup et vont donc être autorisées pour l’alimentation humaine alors que les études indépendantes pointent la dangerosité de ces produits et qu’on attend toujours une étude de grande ampleur financée par l’Europe. On va être dans la situation ubuesque où collectivités locales et particuliers ne pourront plus utiliser des produits dont l’Europe encourage l’utilisation dans nos champs et nos assiettes.Deux œillets OGM ont aussi été autorisés : outre le gène de résistance au Roundup, on leur a donné un gène de violette pour tenter d’obtenir des œillets bleus. Le résultat n’est pas très probant, mais ils vont être commercialisés. Question sécurité, une étude de 40 jours sur des souris n’a pas montré de « toxicité aiguë » (comprendre, les souris ne sont pas mortes). Il est aussi mentionné qu’il n’est « pas probable » qu’il y ait des croisements avec les œillets sauvages. Nous voilà rassurés !Alors que des millions d’Européens ont exprimé leur refus des OGM, les institutions européennes ont décidé de passer en force et de nous imposer des produits dont tout laisse penser qu’ils sont dangereux pour la santé et l’environnement.
Commission nationale écologie