Publié le Vendredi 13 avril 2012 à 19h12.

La crise, toujours !

Trois études récentes indiquent clairement que les différents scénarios de sortie de crise, comprenant notamment des plans d’austérité, seront sans effet et pourraient même augmenter la récession.Alors que la crise bat son plein, il est à noter trois titres récents et convergents : la note de conjoncture de mars 2012 de l’Insee note « La fièvre tombe, le rétablissement sera lent », instituts statistiques allemand, français et italien publient une note commune « Les tensions s’apaisent, mais la croissance reste faible », et pour l’OFCE1, « Qui sème la restriction récolte la récession ».

Il y a accord sur l’analyse de la situation à court terme. Les tensions financières se sont provisoirement apaisées : la Grèce a obtenu une restructuration et une annulation partielle de sa dette (qui est passée de 160 % à 120 % du PIB), et la Banque centrale européenne (BCE) a accordé aux 800 banques européennes deux prêts sur trois ans au taux de 1 %, de 500 milliards d’euros chacun fin décembre, puis fin février (procédure qu’elle continue de refuser aux États en difficulté qui doivent s’endetter à plus de 5 %). L’éclatement de la zone euro semble écarté pour l’instant. Il y a aussi accord sur la « montée inexorable du chômage ».

Mais rien n’est réglé, car les « marchés » s’acharnent contre le modèle social européen et son niveau de dépenses publiques. On l’a vu jeudi 4 avril avec l’emprunt public espagnol qui a atteint à peine la moitié du montant demandé par le nouveau gouvernement conservateur espagnol, et après que celui-ci a lancé un super plan d’austérité, alors que le taux de chômage est déjà à 23 %.

Mais seul l’OFCE présente des analyses et des prévisions à un peu plus long terme, posant, comme nous, la vraie question : la stratégie européenne de réduction à marche forcée des déficits publics (sur laquelle s’accordent avec des nuances Sarkozy et Hollande) entraînera un fort ralentissement économique en 2013, voire, dans certains pays, une véritable récession. Par exemple, selon les calculs de l’OFCE, les politiques budgétaires restrictives cumulées en Europe font que la croissance du PIB de 2012 ne sera que de 0,2 % (au lieu de 2,5 %) en France, et même en Allemagne de 0,3 % (au lieu de 1,7 %).

De plus, l’OFCE présente trois scénarios encore plus à risque pour 2012 et surtout 2013. Le premier scénario suppose une surenchère contre les dépenses publiques au cas (probable !) où les plans d’austérité ne feraient que creuser un peu plus les déficits. La croissance du PIB serait encore plus faible de 1 % environ pour chaque pays de la zone euro, avec les conséquences sur le chômage. À la suite du premier, le second scénario envisage un « défaut » dans un pays de la zone euro (analogue à celui de la Grèce). Les premiers candidats à ce destin pourraient être le Portugal et l’Espagne, ainsi que l’Italie. Cela pourrait conduire à la sortie, volontaire ou non, du pays défaillant de la zone euro, voire à l’implosion de celle-ci et alors à une crise monétaire mondiale. Le troisième scénario est celui d’une contagion des difficultés de la zone euro vers les États-Unis et le Royaume-Uni. Mais, comme l’écrit l’OFCE, « dans aucun des trois scénarios la crise n’est réglée, les répliques pouvant surgir n’importe où et n’importe quand ».

Jacques Cherbourg1. Institut indépendant d’études économiques.