Publié le Jeudi 23 avril 2020 à 09h02.

Retour sur le mobilisation contre la LPPR à l’université de Savoie

Au mois de janvier dernier, alors que la mobilisation contre la réforme des retraites était encore vive, une attaque supplémentaire est venue s'abattre sur le service public d'enseignement supérieur et de recherche français, sous la forme d'un projet de loi encore non finalisé : celui de Loi Pluriannuelle de Programmation de la Recherche. Contrairement à ce que son nom indique, cette loi ne concerne pas seulement la recherche, mais bien tout le système d'enseignement supérieur et de recherche, dans la mesure où elle aura des conséquences en termes de recrutement et de charge de travail des personnel.le.s – administratifs comme enseignants- chercheurs.

Dans les grandes lignes, cette loi vise à :

1. augmenter la charge de cours d'une grande partie des enseignants-chercheurs, au profit de quelques-uns considérés comme meilleurs et donc dignes de faire plus de recherche. Dans la pratique, cette disposition menace la qualité des enseignements, et valide l'idée que l'enseignement est une punition, une activité moins inté- ressante et importante que la recherche.

2.réduire drastiquement le nombre de postes de titulaires, au profit de tenure-tracks, de CDD et de contrats de projets – c'est-à-dire qui prennent fin à la fin du projet de recherche. Dans la pratique, cela signifie une précarisation accrue des personnels, administratifs comme enseignants et/ou chercheurs.

3. approfondir une logique de financement sur projet, de recherche ou pédagogique, au détriment des financements pérennes et du financement de la recherche réputée « inutile » - notamment en lettres et sciences humaines.

4. l'heure où le coronavirus frappe le monde entier, le chercheur Bruno Canard peut témoigner des conséquences délé- tères de cette logique de financement : entre 2003 et 2006, son équipe a bénéficié de financements européens pour la recherche sur les coronavirus, financements mis en place après l'épidémie de SRAS de 2003. Cependant, la gestion court-termiste prônée par le néolibéralisme a conduit à la suppression de ces financements en 2006, alors que le souvenir du SRAS s'effaçait déjà dans les mémoires. Comme le dit Canard, « la science ne marche pas dans l’urgence et la réponse immédiate » : exigeons des financements pérennes à la hauteur des besoins, pour la recherche comme pour l'enseignement !

Le projet LPPR se situe ainsi dans la droite ligne des politiques néolibérales qui ont déjà touché l'université ces dernières années, et qui aboutissent à une situation de sous-financement structurel – utilisée par le gouverne - ment en 2018 pour légaliser la sélection à l'entréeen licence (loi ORE).Mais cette fois, face à cette énième attaque, le mouvement de riposte au plan national a été plus vif chez les personnels, comme en témoigne la réussite de la journée « l'université s'arrête » du 5 mars, ainsi que la tenue de deux coordinations « facs et labos en lutte » qui ont réuni chacune plus de 600 participants.

A l'Université Savoie Mont Blanc, les mois de janvier, février et mars ont vu s'organiser plusieurs dizaines d'étudiant.e.s et de personnel.le.s, qui ont tenu plusieurs assemblées générales et ont préparé avec succès la journée de mobilisation du 5 mars. Ce jour-là, sur le campus de Jacob, la matinée a été consacrée à des ateliers-discussions autour de l'écologie, du féminisme, des luttes LGBTQI+ et des évolutions du système universitaire, animés principalement par les étudiants. A 14h, étudiants et personnels mobilisés des deux campus de l'agglo chambérienne ont symboliquement enterré l'université et la recherche rue Marcoz, devant les locaux de la présidence, avant de partir en manifestation dans le centre-ville – prenant de cours la police à la Préfecture.

Le confinement a pris de court la suite de la mobilisation, interdisant de se rassembler physiquement. Pour autant, les étudiants et personnels restent en lien et continuent à s'organiser, notamment pour dénoncer la « continuité pédagogique » imposée et faire valoir les droits des uns et des autres face à la validation à distance des enseigne- ments. Ce n'est ni aux étudiants, ni aux personnels de payer la catastrophique gestion de cette crise sanitaire par le gouvernement !

Pour en savoir plus sur la LPPR et sur la mobilisation nationale contre ce projet :www.universiteouverte.org. Vidéo de pré- sentation de la loi : https:// universiteouverte.org/2020/01/30/la-lppr- en-video/

Reportage de TVNetcitoyenne sur la mo- bilisation du 5 mars à Chambéry : http:// www.tvnetcitoyenne.com/n…- details.php? page=content&type=videos&idcontent=6 771