Publié le Mercredi 15 juillet 2009 à 18h00.

Aubade : la dernière leçon...

La casse de l'usine de confection Aubade, à Saint-Savin (Vienne), va se traduire par 104 licenciements dans une région déjà très touchée par la crise automobile (Heuliez, Fabris, et tant d’autres).

Depuis deux ans, l'entreprise Aubade, propriété du groupe suisse Calida, a transféré son savoir-faire en Tunisie. Ce transfert de compétences a été fait par les salariés eux-mêmes. On ne peut imaginer un seul instant qu’un choix ou qu’un débat leur a été proposé. L’intérêt pour les actionnaires de ce groupe est parfaitement clair et précis : non contents d’avoir bénéficié de 700 000 euros de subventions publiques, en 2008, ils se sont octroyé simultanément des dividendes de... 700 000 euros. Apprécions à sa juste valeur ce détournement de fonds publics.

Un remboursement, demandé et obtenu par les élus de la région Poitou-Charentes, serait vraiment le bienvenu et montrerait concrètement la volonté et l'implication des élus dans ce dossier.

En Tunisie, le coût salarial est très bas : environ 400 euros par mois pour une ouvrière en confection, en comptant les cotisations salariales et patronales. Un smicard en France, pour un poste à temps plein, « coûte » à l’entreprise 2000 euros par mois. En Tunisie (où l'on travaille six jours sur sept), les entreprises, qui œuvrent principalement pour l'export, ne paient pas d'impôts sur le bénéfice. De plus, les douanes tunisiennes sont beaucoup plus accommodantes en termes de droit depuis un an et demi, suivant des accords préférentiels avec l'Europe. Tableau gagnant sur toute la ligne pour les actionnaires. En toute logique, si la production devient tunisienne, avec une délocalisation des machines de production vers la Tunisie, c'est bien la preuve que les ventes de lingerie se portent suffisamment bien. Pendant ce temps, le coût du licenciement des 104 d’Aubade sera pris en charge par la collectivité.

Nous paierons tous pour servir plus de bénéfices à une minorité, par nos cotisations salariales et patronales et par les fonds publics engagés dans cette entreprise. Au final : toujours plus d’argent pour les actionnaires, de misère pour Saint-Savin et d’exploitation pour les travailleurs tunisiens.

Nos camarades de Saint-Savin ne se bercent pas d’illusions : les élus locaux et régionaux, dont Ségolène Royal (verra-t-on Jean-Pierre Raffarin ?), viendront et feront de beaux discours (élections régionales obligent), sans autre perspective d'avenir pour l'industrie poitevine.

Laissera-t-on fusiller contre le mur du profit les 104 de Saint-Savin ? L’insurrection des esprits contre la fatalité et la capacité d’indignation sont aussi des devoirs.

Guy Besse