Publié le Mercredi 20 mai 2020 à 15h51.

La reprise dans les usines automobiles : produire sous la menace de l’épidémie

À partir des compte-rendus des militantEs NPA du secteur automobile, voici le point sur la reprise de la production d’automobiles. Alors que chacunE est contraintE de fournir son relevé personnel de température à l'entrée de l'usine, c'est la preuve que l'épidémie de coronavirus continue ! 

La reprise de la production d’automobiles a commencé dans la plupart des usines en France le 11 mai 2020, Toyota ayant été une exception pour une usine de montage avec une reprise dès le 21 avril. Les usines de moteurs Renault à Cléon et PSA à Douvrain ont été les premières à rouvrir avec un nombre réduit d’équipes et de salariéEs. La situation changera à partir de lundi 18 mai et surtout de la semaine prochaine : ce sera largement la fin du volontariat et la reprise de la production dans la plupart des usines de montage.

Même avec les effectifs réduits de ces premières semaines, les conditions de travail sont profondément dégradées. Travailler avec un masque sur une chaîne de production ou sur un plateau en open space est un nouveau facteur de pénibilité. Et c’est pire lorsque c’est le port d’un masque FFP2 qui est requis, là où l’installation des machines ne permet pas de respecter les distances « sociales ». Et partout les mêmes protestations s’expriment sur le manque de ventilation et de climatisation, rendant de moins en moins supportable le travail dans des locaux conçus pour fonctionner avec ce type d’équipements. 

Les contrôles de température à l’entrée dans l’usine rappellent en permanence la persistance de la menace de la contagion. Et les plus menacéEs  peuvent être interditEs d'entrée sans explication supplémentaire, ni garantie d'être payéEs. 

Toute la hiérarchie des usines et des établissements veut non seulement faire produire dans ces conditions, mais faire produire au maximum pour retrouver au plus vite ses objectifs de productivité d’avant crise. Pourtant, le retour au collectif qu’entraîne cette reprise de la production peut permettre de s’opposer à cette remise en cause si brutale des conditions de travail…

PSA Mulhouse. La reprise a eu lieu lundi 18 mai au matin pour le ferrage, la peinture et le montage : cela représente 1100 personnes – environ la moitié de l’effectif. Les bus du personnel ont été bloqués une heure aux portes de l’usine afin de contrôler les attestations de température des gars. 60 personnes ont été renvoyées chez elles, dont une trentaine reconduites par taxi. La direction dit que leur journée sera payée… en fonction de l'avis médical. C'est donc très flou car les motifs du renvoi à domicile peuvent être simplement l’absence d’attestation. 

15 voitures avaient été produites vers 11h30. Une trentaine au total pour toute la journée. Il manque du monde partout, même si des intérimaires ont repris leur activité. Près de 30 salariés qui étaient en prêt à Sochaux ont été rappelés pour venir travailler au montage. Les conditions de travail sont difficiles du fait du port des masques et des visières.

Que sera la paie avec seulement 3 jours travaillés par semaine ? On ne sait pas. 

PSA Sochaux. La reprise du travail se fait encore sur la base du volontariat. On a d'abord une équipe sur le système 1 (la 308), puis le 25 mai le démarrage d'une équipe sur le système 2 (la 3008) et enfin, le 2 juin, une deuxième équipe sur le système 1. Mais à partir du 25 mai, la notion de volontariat prendra fin et on reviendra au travail obligatoire : c’est la direction qui missionnera les effectifs.

Vendredi 15 mai matin, ce sont d'abord 200 salariéEs qui ont fait redémarrer l’outil industriel sur le système 1, en commençant par l’emboutissage et le ferrage (où l’on réamorce l’encours de pièces). Lundi 18 mai, 300 autres salariéEs ont été appeléEs pour relancer, à petits pas, la ligne de production de la 308. La troisième vague aura lieu mardi 19 mai avec 730 salariéEs en production, touTEs volontaires, qui reprendront alors le travail. C’est moins du dixième de l’effectif de Sochaux. 

PSA La Janais. L’usine a repris avec une seule équipe au lieu de quatre. Dès mercredi 20 mai, 140 véhicules devraient être produits chaque jour. Avant la crise sanitaire, une équipe produisait 190 voitures et, avec quatre équipes, 500 voitures sortaient chaque jour des lignes de production de PSA La Janais.

PSA Poissy. Redémarrage lundi 11 mai de l’emboutissage, avec 57 salariéEs volontaires. La direction cherche de nouveaux/elles volontaires pour démarrer la peinture. Puis, à partir du 19 mai, il est prévu 2 équipes. Pas de date annoncée concernant le montage.

Le travail au volontariat se poursuit avec sur le site 20 personnes en retouche, 15 au PAC, 120 personnes sur les bacs batteries et 300 pour la fabrication des respirateurs. 

Le travail deviendra obligatoire la semaine prochaine en 3x8 sur les bacs batteries. Pas de date précise pour la reprise de l'activité montage.

PSA Hordain. Une première reprise partielle avait eu lieu lundi 11 mai, avec une seule équipe contre trois habituellement. Ce fonctionnement devait durer jusqu’à la fin du mois de mai. Mais la direction de l’usine a remis en cause ce protocole, en annonçant le passage à deux équipes dès le 25 mai. Pour assurer le fonctionnement de ces deux équipes, elles seront complétées – suite à l’absentéisme dû au coronavirus et à ses menaces particulières sur les plus fragiles – par des salariéEs volontaires de l’équipe de nuit et le recours à environ 120 salariéEs venuEs de Poissy.

PSA Ingénierie.  Le chômage technique – qui concerne 60 % du personnel – est prolongé jusqu’à fin mai. Beaucoup d’activités « nouveaux projets » ont été mises en veilleuse à l’ingénierie PSA. C'est donc une reprise encore en demi teinte. Pour la plupart des activités maintenues, le télétravail est mis en place. Les intentions de PSA de le généraliser après l’épidémie, avec une présence sur poste très limitée, fait discuter. 

Renault Cléon. Tous les secteurs de l’usine ont repris lundi 18 mai. Cela représente 2400 salariéEs, c’est à dire la moitié de l’effectif. Mais dans cette moitié, il y a 90 % des salariéEs de la production proprement dite. 

La fonderie tourne en 2x8, plus la nuit et en Samedi-Dimanche. Cette production est destinée au moteurs essence pour la Roumanie et l’Espagne. 

Au début du confinement, le temps de travail journalier était de 6h payées 8h. Depuis le 11 mai, il est porté à 7h45 payé 8h. L’écart de ¼ h est destiné a éviter le croisement des équipes. Le reste du personnel est en télétravail ou au chômage partiel. 

Pas de restauration sur place, des micro-ondes et réfrigérateurs ont à nouveau été mis à disposition mais, du fait des réfectoires trop petits, de l'application de la distanciation, et de la crainte des employéEs à utiliser le matériel commun, les salariéEs ne mangent pas sur place et font de longues queues pour atteindre leurs vestiaires. 

Le protocole est appliqué avec beaucoup de protestations – individuelles pour le moment. C’est déjà dur avec la moitié de l’effectif, l’absence de ventilation, le port des masques ; qu’est ce que cela va être avec la totalité de l’effectif en poste, et la chaleur de l’été arrivant ! 

Renault Lardy. L’activité ne s’est jamais arrêtée sur ce centre d'essais. Il n’y a eu jamais moins de 400 présentEs sur le poste de travail. Passant à 800 fin avril, le chiffre de 1000 a été atteint le 11 mai. Et en plus le télétravail s’est généralisé. Vraiment pas d’arrêt des activités ! 

Dans les open spaces la ventilation a été coupée, entraînant des conditions de travail de plus en plus difficiles 

Renault Flins. Une reprise partielle a été effectuée à partir du 11 mai. 200 voitures sont produites – contre une moyenne de 700 habituellement –, avec une semaine de travail alterné. Seuls la moitié des employéEs est donc présente pour l’instant. 

Des mesure de sécurité non respectées par la direction entraînent des ripostes 

Renault Technocentre. La reprise très progressive combine développement du télétravail et travail sur site. Dans le semaine qui a suivi le 11 mai, il y a eu 900 présentEs sur le Technocentre de Guyancourt.

Les 3 cantines ouvertes – sur les 4 prévues – sont peu fréquentées du fait de l’application des règles de sécurité. Le personnel préfère déjeuner à son poste de travail. Est ce que cela pourra durer longtemps ? 

Pour les prestataires nettoyage dépendant de  Veolia, des tests seront proposés après accord entre des labos et Veolia, qui a obtenu un type d'accord, concernant de tels tests, n'existant ni chez Renault ni chez PSA.

Le port du masque FFP2 pose des difficultés évidentes de respiration, alors qu’il est requis dans les zones où la clim est coupée et où ne fonctionne que le recyclage d’air. Là encore, cette reprise témoigne de conditions de travail inacceptables si les mêmes règles de sécurité sont appliquées avec les mêmes exigences d'activités ou de quantité de production.