Publié le Jeudi 22 janvier 2015 à 20h28.

Les “forçats de la route”

Le transport routier de marchandises est depuis des années un des secteurs économiques les plus modelés par le néolibéralisme au détriment de l’écologie et des travailleurs du secteur.

En effet, à partir de 1985-1986, sa logique de fonctionnement a été profondément modifiée avec des mesures nationales (la suppression de la tarification routière obligatoire – TRO) et européennes (création d’un marché européen du transport routier). La TRO fixait des prix planchers, la conséquence de sa suppression avait pourtant été anticipée. Comme l’écrivait à l’époque un rapport : « Admettre qu’un artisan transporteur est capable en toute liberté de débattre son prix face à une puissante société industrielle est une illusion démentie par l’expérience de tous les jours… Il en résultera un avilissement des prix. »

Le marché unique du transport met en concurrence des salariéEs, des entreprises, des pays aux conditions sociales et fiscales très différentes. Les dérives sont multiples : délocalisation d’entreprises, délocalisation du contrat de travail, utilisation de main-d’œuvre dans les conditions sociales d’autres pays que celui du véhicule, prise de marché par des entreprises de pays à moindres coûts sociaux... Par ailleurs, la SNCF a organisé la baisse de ses activités de fret. Au final, a été favorisé le développement d’un secteur routier considéré comme plus « performant ». Et peu importe les conséquences sur l’environnement et les salariéEs !

Les patrons des grandes entreprises de transport, même profitables, pressurent au maximum leurs salariéEs, ceci en dépit de tous les avantages dont ils ont bénéficié : 500 millions à 600 millions d’euros du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), mesures sur le prix du gazole... D’ailleurs, comme le note un rapport de la Banque de France (cité par les Échos du 20 janvier), ces entreprises ont vu leur rentabilité augmenter.

Le mouvement actuel des chauffeurs routiers intervient pour peser sur la négociation annuelle obligatoire (NAO) sur les salaires. Les syndicats exigent 100 euros d’augmentation en moyenne pour tous les chauffeurs, avec un nouveau taux horaire minimum de 10 euros pour les salaires les plus bas (soit une revalorisation de 5 %). Pour se faire entendre des patrons et du gouvernement, les salariéEs ont recouru à la grève, aux barrages filtrants et aux blocages de sites. Ils ont raison.