« Votre entreprise peut-elle fonctionner sans salariés ? » titre un article du journal les Échos du lundi 21 septembre, se fondant sur le rapport sur l’économie numérique que vient de remettre à la ministre du Travail le DRH d’Orange Bruno Mettling.
Partant du fait que dans le numérique, beaucoup de travailleurs n’ont pas un statut de salarié, ce rapport préconise d’en prendre acte et de brouiller encore plus les frontières, ce qui permettrait aux patrons de recourir encore plus à une main-d’œuvre malléable car sans droits dans l’entreprise. Mais sans salariés ne veut pas dire sans travailleurs : comme le dit un DRH, travailler avec des auto-entrepreneurs, des indépendants, des sous-traitants sur site, etc. « permet de s’exonérer des coûts et risques d’un contrat de travail ». En fait, sous couleur d’un discours moderniste, il s’agit d’un projet global du capital dans cette phase de son histoire : amplifier une catégorie de travailleurs ayant toutes les contraintes du travail subordonné sans les garanties qu’ont encore les salariés.
Ce « modèle » de l’entreprise « sans salariés » est appliqué en grand par l’entreprise espagnol Telefonicà qui emploie directement au plus 20 000 salariés (et cherche encore à en réduire le nombre), mais où il y a en plus à peu près 100 000 travailleurs taillables et corvéables... Et il arrive que ceux-ci se révoltent : ce fut précisément le cas cette année à Telefonicà où les travailleurs se sont mis en grève dans tout l’État espagnol (voir l’Anticapitaliste la revue n°68, septembre 2015).
Sans salariés ou pas, le capitalisme ne peut vivre sans la plus-value produite par les travailleurs subordonnés au capital. Les unifier est un défi à relever.