Publié le Dimanche 14 février 2016 à 08h16.

Sodexo-Marseille (13) : Quand les chauffeurs refusent de se faire rouler !

Entretien. à l’issue de deux mois de grève, nous avons rencontré Christian, délégué CGT à la Sodexo.

Peux-tu nous retracer les étapes du conflit ?

La Sodexo fournit et livre les repas dans les 445 écoles de la ville de Marseille, soit environ 54 000 repas par jour... Des livraisons assurées, jusqu’au conflit, par 28 camions et une camionnette-frigo, et donc 29 chauffeurs-livreurs.

Le nombre insuffisant de camions représentait une surcharge et un danger potentiel pour les usagers, qui engageait directement la responsabilité des chauffeurs. Nous avons donc décidé de mettre la pression sur la direction pour qu’elle trouve une solution rapide à la situation. Leur seule réponse a été la possible mise en place d’une cellule chargée d’étudier le problème... pour la rentrée de septembre !

Nous avons donc décidé la grève, et déposé le 16 novembre un préavis (auquel nous ne sommes pas tenus) dans le seul but de ne pas pénaliser les enfants des écoles.

Quelle a été la réponse de la direction de la Sodexo ?

N’ayant aucune réponse, nous avons commencé la grève une semaine plus tard. Les chauffeurs ont tout de même livré ce jour-là les repas déjà prêts pour ne pas générer trop de pertes alimentaires.

Le lendemain, la direction proposait de 60 à 100 euros d’augmentation pour les agents de la cuisine centrale et 5 RTT pour les administratifs. Des propositions intéressantes, mais ne tenant pas compte des revendications des agents de la logistique, 200 euros d’augmentation et surtout un allègement des charges de travail.

Ce refus de réponse a amené à reconduire la grève à partir du 25 novembre à 7h. Aucune cantine n’était plus livrée. Dans la matinée, un huissier est venu demander aux salariés s’ils reconduisaient la grève, ce que tout le monde a confirmé. Huissier, responsable logistique et RH font la sourde oreille, et face à notre refus de reprendre le travail, ont décidé notre mise à pied, nous imposant de quitter les lieux. Nous avons décidé de rester jusqu’à l’heure de fin de service.

Mais le lendemain, à notre retour, nous avons trouvé le portail verrouillé, des vigiles et des maîtres-chien présents pour filtrer les entrées (demande de carte d’identité...).

Le mouvement s’est donc durci. Malgré l’intransigeance de la direction, le mouvement de grève a duré deux mois. Après l’échec des deux premières réunions de décembre avec la direction nationale, et surtout après celui de la réunion du 8 janvier à la direction régionale de Lyon, la CGT a décidé de faire pression sur Sodexo en appelant par tract à des mouvements sur le plan national, et à un rassemblement devant le siège central à La Défense.

Face à notre détermination, c’est avec l’appui de toute la CGT (UD, UL...) que la direction a fini par plier en acceptant la réintégration de 11 des 17 chauffeurs-livreurs qu’elle voulait sanctionner. L’inspection du travail a même débouté Sodexo du licenciement du délégué du personnel, un salarié protégé, qui n’avait pas encore été réintégré. Et le lundi 1er février, c’est ensemble et victorieux que les 11 sont entrés dans l’entreprise.

Le combat n’est pas tout à fait terminé pour les salariés restants, puisque nous sommes toujours dans l’attente d’une proposition d’indemnisation de Sodexo. Mais nous avons pu prouver qu’une lutte déterminée, avec le soutien de toute la CGT, peut payer face à un patronat de combat.

Propos recueillis par Jean-Marie Battini