Les ouvriers de SPPS refusent une réorganisation synonyme de la fin du pluralisme de la presse. Leur mouvement s’est durci depuis lundi 13 décembre.SPPS est la filiale de Presstalis (ex-NMPP) qui assure la distribution de la presse et des magazines dans Paris et onze communes limitrophes. L’entreprise est menacée de fermeture pour externaliser la livraison des kiosques et la gestion des invendus à des entreprises pratiquant bas salaires et précarité à tout va, bien loin du statut des ouvriers du Livre. Les salariés se sont donc mis en grève le 30 novembre sur la distribution des magazines. Avec leur syndicat, le SGLCE-CGT, ultra-majoritaire aux récentes élections, ils multiplient les opérations ponctuelles visant à saisir du papier qui transite ailleurs, ou occupant le siège de la société parisienne, porte des Lilas, pour empêcher la tenue du Comité central d’entreprise (CCE). Ils ont également bloqué la distribution des quotidiens pour exiger la libération de neufs salariés placés en garde en vue lors d’une nuit d’action où la police a voulu faire du zèle. Mais ni ces gardes à vue ni les plaintes déposées ici et là n’ont entamé leur détermination. Ces actions, soutenues par le Syndicat général du Livre, en particulier par les travailleurs des imprimeries de presse quotidienne et du Journal officiel, ont permis quelques avancées dans la négociation. On est passé de l’annonce de la disparition de l’entreprise au maintien d’un de ses trois centres, celui de Bobigny, avec l’idée de le doter de la distribution des quotidiens et des seuls hebdos politiques. Avec des reclassements et un plan social « de haut niveau », comme disent régulièrement les patrons de cette profession où l’emploi s’est littéralement effondré depuis 30 ans. Pour les délégués SPPS, la négociation continue avec l’objectif de maintenir la surface distribuée, de conserver les statuts des travailleurs et de maintenir la totalité de la charge de travail. Le contre-plan présenté à la direction maintient 122 ouvriers sur 186. La réorganisation proposée par le syndicat intègre en effet un effort réel de gain de productivité mais contrecarre les projections patronales sur les économies à faire en sous-traitant le boulot à des smicards à temps partiel… Au-delà des enjeux sociaux, ce conflit restera comme l’un des marqueurs de la résistance de la profession à la destruction des outils de défense du pluralisme mis en place à la Libération. Les États généraux de la presse voulus par Sarkozy et les préconisations du rapport Mettling indiquent clairement que la presse doit devenir une marchandise comme les autres, c’est-à-dire une machine à cash. Impression, distribution, abonnements, toute l’architecture des aides publiques est remise en cause avec l’objectif avoué de laisser crever les titres « non rentables ». Même si le système actuel est très insuffisant pour assurer un vrai pluralisme, la disparition des derniers éléments issus de la Libération serait une aggravation supplémentaire. De ce point de vue, le cas des NMPP (aujourd’hui Presstalis) qui assurent la distribution de tous les titres à égalité est emblématique puisque dans ce système les gros éditeurs paient les camions dans lesquels les petits éditeurs montent aussi. Pour toutes ces raisons, le 6 décembre, Olivier Besancenot est venu apporter son soutien aux travailleurs lors d’une Assemblée générale au centre de Bobigny. Il a aussi répondu à l’invitation du comité NPA des Industries graphiques le même jour pour une rencontre débat autour d’un buffet qui à réuni plus de 35 camarades dont de nombreux responsables syndicaux. Il est clair qu’il va falloir taper plus fort pour faire céder les éditeurs et derrière eux le gouvernement.Jean-Yves Lesage
Crédit Photo
Photothèque Rouge/Milo