Le verdict est tombé le 4 décembre : l’inspectrice du travail de Tefal et le salarié qui avait révélé les pressions exercées par l’entreprise pour obtenir sa mutation ont été condamnés par le tribunal d’Annecy à une amende de 3 500 euros avec sursis.
Ils devront en outre verser 1 euro symbolique à Tefal et payer les frais de justice engagés par l’entreprise, et subir l’inscription de la peine à leur casier judiciaire.
Le lanceur d’alerte est condamné pour détournement de courriels internes prouvant les pressions, et l’inspectrice du travail pour violation du secret professionnel et recel. Il lui est reproché d’avoir transmis aux syndicats du ministère du Travail les courriels, et de les avoir utilisés pour dresser un procès-verbal d’obstacle à ses fonctions.
Un prétexte qui dissimule le fond de l’affaire : Tefal a mobilisé tous les relais locaux du patronat et de l’État (Medef, préfecture, RG, parquet, direction départementale du travail) pour faire taire la fonctionnaire qui, en demandant la renégociation de l’accord d’entreprise sur le temps de travail ou la mise en place d’une hotte aspirante pour assurer la protection des travailleurs contre l’inhalation de produits chimiques, avait simplement cherché à faire appliquer le droit du travail. Le procureur d’Annecy avait alors étalé toute sa morgue de classe : classant sans suite le procès-verbal accablant Tefal, il poursuivait le salarié et l’inspectrice, y voyant l’occasion de « faire le ménage » à l’inspection du travail !
Un signal donné
L’issue de ce procès à front renversé a créé un choc énorme. Le signal est donné au patronat qu’il est possible d’obtenir la condamnation pénale des agents de l’inspection du travail, les agents de contrôle sont invités à baisser la tête de crainte de subir un sort identique, dans un contexte professionnel déjà très difficile mettant en jeu l’avenir même de l’inspection du travail (suppressions de postes, surcharge de travail, réformes incessantes du code du travail, pressions internes pour orienter l’activité vers les conseil aux entreprises…). Le tout avec la participation du ministère du Travail qui a préféré couvrir la hiérarchie locale et, se cachant derrière l’indépendance de la justice, n’a jamais condamné publiquement les agissements de Tefal ni reconnu les pressions exercées, malgré un avis rendu par le Conseil national de l’inspection du travail.
Dès l’annonce de la condamnation, la mobilisation s’est organisée. À Paris, une centaine d’agents de l’inspection du travail francilienne se sont rassemblés, malgré l’état d’urgence, devant le ministère du Travail, où une délégation intersyndicale a été reçue. La ministre du Travail a assuré qu’elle ne révoquerait pas leur collègue, ce que l’inscription de la peine au casier judiciaire pouvait laisser craindre, mais se refuse toujours à toute expression publique de soutien. La procédure en appel sera l’occasion d’autres initiatives, pour la relaxe de notre collègue et contre l’acharnement dont elle fait l’objet.
Le comité inspection du travail – Pôle emploi Île-de-France