Publié le Mardi 19 décembre 2017 à 14h43.

Vaincre des géants comme ONET et la SNCF, c'est possible !

Après une victoire en justice contre la SNCF et suite aux négociations avec la direction d'H. Reinier-ONET, les salariés grévistes du nettoyage des gares SNCF ont réussi à arracher une énorme victoire avec la satisfaction de la quasi-totalité de leurs revendications, après 45 jours d'une grève très majoritaire sur les gares du nord de l’Île-de-France.

Avec courage et détermination, les grévistes du nettoyage ont réussi à obtenir le passage de touTEs les salariéEs à la convention collective manutention ferroviaire (plus avantageuse que la convention du nettoyage), l'annulation de la clause mobilité, le maintien de l'effectif, l'augmentation de la primer de panier à 4 euros, l'intégration en CDI du collègue qui avait des problèmes de papiers (qui a finalement eu son titre de séjour), la prolongation des mandats des délégués jusqu'aux prochaines élections, et une prime de remise en état des gares d'un montant équivalent à deux semaines de salaire. Ils ont également obtenu l'annulation de toutes les sanctions disciplinaires à l'encontre des grévistes. Par ailleurs, ONET va payer deux semaines de salaire de novembre (mois complet de grève) qui seront retirés progressivement aux salariéEs par étalement sur 6 mois. En résumé, une énorme victoire ! Une véritable leçon de lutte et détermination, une démonstration que les travailleurEs peuvent résister aux attaques, et gagner face aux patrons, même avec les nouvelles lois Macron.

Auto-organisation

Les grévistes se sont réunis chaque jour en assemblée générale, pour décider ensemble des actions à mettre en place pour faire connaître et diffuser leur lutte. Cette assemblée générale a donné chaque jour mandat à l'intersyndicale Sud-Rail-CFDT-FO, sous contrôle des grévistes. Une grève militante, avec des tournées organisées dans les trois gares stratégiques, Saint-Denis, Garges-Sarcelles et Ermont-Eaubonne. Les grévistes se sont relayés nuit et jour, pour tenir les piquets et s'assurer que la direction d'ONET, en complicité avec la SNCF, n'envoie pas des intérimaires, souvent accompagnés de la police, pour tenter de nettoyer les gares de force. 

Un autre élément important d'auto-organisation a été la mise en place de la caisse de grève. De nombreuses organisations (syndicales, politiques) ont manifesté leur soutien par l'envoi de chèques ainsi que beaucoup de particuliers : plus de 3000 dons sur internet, en plus des centaines de personnes qui ont donné de l'argent dans les différentes collectes organisées par les grévistes. En tout, près de 80 000 euros récoltés, soit un énorme soutien pour les travailleurEs en grève, notamment pour un secteur avec des petits salaires. 

Large soutien

Malgré les poubelles qui débordaient, la grève des salariés du nettoyage a été soutenue très largement par la population. Les grévistes, 84 pères et mères de famille, se battaient pour le respect et la dignité, avaient décidé de ne pas se laisser faire et de relever la tête, et c'est pour cette raison que le soutien a été quasi-unanime. Tous les jours, des gens sont venus au piquet pour apporter de la nourriture, de l'argent, pour aider à diffuser la grève auprès des usagerEs. 

De nombreux cheminotEs, à commencer par les militants de Sud-Rail, se sont mobilisés : une alliance d'autant plus importante lorsque c'est le donneur d'ordres, la SNCF, qui a assigné 9 grévistes en justice pour « occupation illégale des gares ». Mais la mobilisation des grévistes et soutiens a permis de l’emporter, y compris sur le terrain des institutions, contre la direction de la SNCF, qui a été condamnée à verser 500 euros à chacun des grévistes assignés.

Cette alliance entre cheminotEs et travailleurEs du nettoyage est prometteuse pour les luttes à venir. Une première victoire dans une lutte de longue haleine pour en finir avec la sous-traitance. 

Convergence des luttes

Le succès de cette lutte a été aussi celui des liens tissés entre différents combats. Des féministes du mouvement #MeToo en passant par les salariéEs de l'hôtel Holiday Inn, en grève depuis 2 mois, ou les membres du comité Vérité pour Adama, tous les combats contre l’exploitation et l’oppression ont été bienvenus et se sont retrouvés sur le piquet d’ONET. Dans un des moments les plus émouvants de la grève, Assa Traoré est venue sur le piquet et a confié être la fille d’une des travailleuses qui avaient déclenché la grève. Les travailleurEs ont, à leur tour, exprimé leur soutien à la famille Traoré, lorsque les frères Youssouf et Bagui ont été à nouveau interpellés et condamnés – un véritable acharnement. Au vu de l’importance de l’unité entre le mouvement ouvrier et la jeunesse des quartiers, on voit à quel point cette victoire est porteuse d’espoir.

Pour toutes ces raisons, la victoire des grévistes du nettoyage des gares SNCF est la victoire de tous les précaires et de tous les travailleurEs. Une victoire qui en appelle d'autres, et surtout qui pose les bases des prochaines batailles à construire, notamment contre la sous-traitance et la précarité qui touche de plus en plus de salariéEs. 

Laura Varlet