Publié le Mercredi 29 septembre 2021 à 19h00.

On vous dit pourquoi c’est le moment d’un mouvement d’ensemble dans les transports !

La lutte à Transdev1 se poursuit. L’occasion de faire le point sur les bonnes raisons de se mobiliser dans le secteur des transports.

Soumis à un phénomène de pyramide des âges, le métier de conducteur routier de voyageurs souffre également d’un grand « manque d’attractivité », comme disent les patrons.

Bas salaires, manque de personnel

Les salaires sont à peine supérieurs au smic (10,70 euros de l’heure pour la convention la plus faible, celle de l’interurbain), et les conditions de travail très difficiles. On doit commencer très tôt ou bien finir tard – ou les deux, lors des journées « en amplitude », appelées aussi des services en deux vacations : deux périodes de travail séparées d’une coupure de plusieurs heures en pleine journée. Les temps de coupure ne sont que partiellement payés, c’est un des enjeux de la lutte de Transdev en Île-de-France. De plus, les embauches se font souvent en « contrat période scolaire », un contrat à temps partiel avec lequel il est difficile de passer les 1 000 euros net.

Si la convention collective de l’urbain est à peine plus favorable (produit d’une histoire de lutte plus riche), le métier reste le même, avec ses stations assises contraintes de longues heures, et les troubles de la santé qui vont avec. La question n’est pas de savoir si les conducteurEs souffriront d’une hernie discale, mais quand ! Le rapport conflictuel aux usagerEs et les problèmes dits de « sécurité » sont un peu plus spécifiques à l’urbain. Comme on l’a vu ces derniers jours à Lyon ou à Metz, ce sont des « incivilités » qui sont à l’origine de certains coups de colère parmi les salariéEs. Mais derrière ces problèmes qui dépassent très largement le cadre des transports publics, les conducteurEs mettent systématiquement en avant la difficulté du métier, la faiblesse des paies et les contraintes sur la vie sociale et familiale. Le bas niveau de la paie couplée à la pénurie de conducteurEs, c’est une situation qui pousse à s’organiser et obtenir les nécessaires augmentations de salaire que les patrons refusent depuis des années.

Un secteur concentré, des patrons coordonnés

La grève de Transdev répond à une attaque patronale qui se veut être un coup d’essai. La logique des appels d’offres, et la dégradation des conditions de travail qu’elle implique, s’étend de la périphérie vers le centre. Déjà depuis longtemps à l’œuvre en régions, ce grand jeu de dupes (ou de Monopoly) où de grands groupes se partagent des marchés en remettant à plat les accords locaux, démarre dans la grande couronne parisienne, avant d’attaquer la capitale, et le ferroviaire. Les anciens opérateurs, PME traditionnellement liées à l’activité grand tourisme, sont rachetés tour à tour par les trois géants à capitaux partiellement publics (Transdev, Keolis/SNCF et RATP). Ce patronat de plus en plus concentré, redoutablement organisé dans des structures comme l’UTP (Union des transports publics et ferroviaires) ou la FNTV (Fédération nationale des transports de voyageurs), pèse lourd sur les autorités organisatrices (aujourd’hui le plus souvent les régions), quelle que soit leur couleur politique…

Les attaques que ce patronat promet aux travailleurEs du transport de tout le pays méritent une riposte tout aussi coordonnée. Non seulement pour la défense de l’existant, par exemple tel ou tel accord local ou de groupe, mais pour aligner ces conditions sur le meilleur pour les salariéEs. Pour cela il est primordial de connaître les conditions de travail de ses camarades des autres dépôts et des autres entreprises. Pour élaborer des revendications communes et organiser une contre-attaque d’ampleur, la coordination devient une nécessité. Les grévistes de Transdev qui attaquent une quatrième semaine de grève peuvent incarner et porter cette perspective… Et touTEs les autres travailleurEs du secteur peuvent les contacter pour construire cette étape.

Un enjeu majeur de la lutte contre le réchauffement climatique

Les rapports du GIEC s’enchaînent, mais les accords de Paris, de Rio et tous ceux à venir se révèlent sans le moindre effet sur une situation climatique de plus en plus alarmante… seul le confinement quasiment mondial au printemps 2020 aura donné une idée approximative de ce qui serait nécessaire pour endiguer le réchauffement, notamment en réduisant drastiquement la circulation automobile. Le capitalisme est incapable de planifier et de réorienter la production pour éviter la catastrophe au plus grand nombre. Les gouvernements agissent dans la panique et dans la sauvegarde à courte vue des intérêts immédiats des plus grandes entreprises.

Or il apparaît évident que la circulation automobile dépend directement de l’offre de transport, réduite par les objectifs de rentabilité immédiate. C’est à partir d’une offre réduite à sa plus simple expression (presque rien en dehors des pointes destinées à acheminer les salariéEs au travail) que sont construits les services en deux vacations. Double effet : en dehors de ces heures-là, les usagerEs sont contraints d’utiliser leur voiture et les conducteurEs subissent les affres de ces journées en amplitude. Les plans de transport laissent à désirer dans bien des grandes villes du pays (ou pour les connexions entre grandes et moyennes villes). Souvent la voiture demeure le moyen le plus rapide de se rendre au travail. Quand ce n’est pas le plus économique ! La gratuité des transports en commun est combattue par les politiques et les entreprises du transport, au nom de considérations réactionnaires et financières.

Nos revendications de travailleurEs du transport public sont au bénéfice des usagerEs et de toute la société : la sécurité pour les conducteurEs, c’est la gratuité ! Le combat contre les amplitudes, c’est l’augmentation de l’offre de transport ! Les embauches pour la fin des heures supplémentaires, c’est le développement des réseaux ! Raison de plus pour porter ces revendications non pas boîte par boîte ou dépôt par dépôt, mais à l’échelle du secteur.

  • 1. Lire sur notre site et dans les précédents numéros de l’Anticapitaliste.