Adoptée le 23 juillet, la loi « pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes » aborde de nombreux sujets mais les moyens pour sa mise en œuvre restent flous, voire absents.
Congé parental : l’égalité sert de prétexte à des économiesPour favoriser l’implication des pères, le congé parental est réduit de 6 mois, les 6 mois complémentaires pouvant être pris à condition que ce soit par le 2e parent. Or seulement 2 % des pères prennent des congés parentaux, et il est peu probable que cela change puisqu’en terme d’égalité des salaires et carrières, les choses n’avancent que très lentement. Dans les faits, la mesure revient donc à diminuer de 6 mois le droit au congé parental... et les allocations qui vont avec.
IVG : au-delà du symbole, pas plus de moyensLa suppression de la notion de situation de détresse est un pas en avant ; l’avortement est ainsi un droit qui ne nécessite pas de justification. L’UMP s’est d’ailleurs abstenue sur le texte à cause de cela et a saisi le Conseil constitutionnel. Mais pour que l’avortement soit réellement un droit pour toutes, il faut des moyens pour rouvrir les 130 centres IVG qui ont fermé en 10 ans et pour assurer réellement la gratuité de l’IVG.
Pensions alimentaires : un dispositif expérimental et limité40 % des mères ne touchent pas la pension alimentaire due par le père ou de façon irrégulière. La loi prévoit que la pension soit prise en charge par la CAF mais de façon expérimentale pour 18 mois. De plus, d’après les dires de Najat Vallaud-Belkacem lors des débats à l’assemblée, cette pension sera équivalente à l’allocation de soutien familial, c’est-à-dire 90 euros, revalorisée à 120 euros en 2017.
Violences faites aux femmes : des mesures sans moyensLa loi prévoit l’obligation pour le conjoint violent de résider hors du domicile du couple mais seulement lorsque la condamnation est devenue définitive. Or c’est bien avant que les femmes ont besoin de moyens, notamment d’accéder à des hébergements d’urgence. Mais là non plus, pas de moyens spécifiques en ces temps d’austérité. Dans les faits les femmes victimes de violences seront donc toujours matériellement à la merci de leur (ex-)conjoint. Pour ce qui est du harcèlement, cette notion fait son entrée dans le code de la défense qui régit l’armée. Mais pour le reste, en particulier au travail, on ne peut pas dire qu’il y ait d’avancée réelle.
Femmes étrangères : plus qu’insuffisant Le refus de délivrer le titre de séjour ne pourra plus être motivé par la rupture de la vie commune et les demandeuses seront exonérées de certaines taxes dues pour le renouvellement de leur titre. C’est plus qu’insuffisant : les femmes étrangères victimes de violences doivent bénéficier d’un titre de séjour automatique et d’aides leur permettant de vivre indépendamment de leur ex-conjoint. Mais cela demande encore des moyens, que le gouvernement n’est pas prêt à mettre. À tout cela, s’ajoutent quelques mesures sur la parité en politique, dans les entreprises, les clubs sportifs ou les établissements publics ainsi qu’une veille du Conseil supérieur de l’audiovisuel pour « une juste représentation des femmes et des hommes » et la lutte contre les stéréotypes et les préjugés sexistes. Au final, de nombreuses mesures symboliques mais sans moyens ni financiers ni coercitifs et qui n’auront donc probablement que peu d’impact. On est bien loin du compte pour une vraie politique en faveur de l’égalité femmes-hommes.
Elsa Collonges