La Fondation Abbé-Pierre a publié le 23 janvier 2023 son 28e rapport. Pour la première fois la dimension genrée du mal-logement y est soulignée dans une étude spécifique.
«La première alerte, la plus immédiatement choquante », déclare le rapport, concerne les enfants, les femmes enceintes ou des jeunes mères avec leurs nourrissons, à la rue en hiver « régulièrement refusées par les services d’hébergement faute de places ».
Les femmes plus exposées au mal-logement
Les femmes étant plus exposées à la précarité que les hommes, du fait des inégalités salariales et des conditions d’emploi, leur accès au logement est plus compliqué et elles sont plus fortement touchées par le mal-logement.
C’est particulièrement le cas pour les femmes seules avec enfants. Elles constituent 83 % des familles monoparentales, et 1/3 d’entre elles vit sous le seuil de pauvreté. Si 20 % de la population est en situation « de fragilité par rapport au logement », ce taux passe à 40 % pour les femmes seules avec un enfant et à 59 % à partir de 3 enfants.
La question du logement est centrale dans les situations de violences conjugales. Sur les 210 000 femmes victimes de violences conjugales chaque années, 17 % ont besoin d’un hébergement. Or, d’après la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), 80 % des femmes victimes de violence sont hébergées dans des dispositifs qui ne sont pas adaptés à leur situation. Et près de 40 % des femmes victimes demandant un hébergement d’urgence sont sans solution.
Les inégalités de genre creusées par les transitions, les séparations
Toutes les situations de transition de la vie creusent les inégalités de genre.
Lors des séparations, le niveau de vie des femmes baisse significativement et cette précarité accrue complique l’accès au logement. La transmission du patrimoine est en général défavorable aux femmes, elles possèdent en moyenne une part moins importante que leur conjoint d’un logement acheté en commun.
Les femmes sont aussi fragilisées par le veuvage. Leur pension de retraite qui est en moyenne de 40 à 28 % inférieure à celles des hommes, les contraint parfois à vivre dans des logements indignes.
Vivre le mal-logement est une autre inégalité de genre que dénonce le rapport. La charge domestique reposant principalement sur les femmes, elles sont en première ligne pour la gestion du mal-logement : un logement indigne ou surpeuplé par rapport à la taille de la famille entraîne une surcharge domestique importante. (inconfort, insalubrité, conséquence sur la santé des enfants…)
L’orientation sexuelle et l’identité de genre sont des « facteurs de vulnérabilité supplémentaires face au logement », les ruptures familiales, les discriminations dans l’accès au logement ou à l’emploi augmentent les risques de se retrouver à la rue. Ce risque est particulièrement important pour les jeunes LGBTQ+, ce qui les expose aux risques de violences sexuelles, d’abus ou de prostitution.
Le rapport souligne que « l’impensé du genre dans les dispositifs d’action sociale accroît l’invisibilité des femmes et des personnes LGBTQ+ parmi les sans-domicile ».