Publié le Mercredi 25 novembre 2020 à 09h47.

Non, la vie des femmes n’est pas une marchandise

Pour Macron et son gouvernement, tout doit être rentabilisé. Y compris les violences faites aux femmes dont la dénonciation explose (+ 192 % au 1er semestre 2020). Comme le dénonce un appel des associations féministes, ce gouvernement, « à travers les annonces de Marlène Schiappa puis d’Élisabeth Moreno, actuelle ministre déléguée chargée de l’Égalité femmes-hommes, a décidé de mettre en concurrence le réseau qui gère le 39 19, via la création d’un marché public ». Cela aura des conséquences pour les 2 000 personnes qui appellent chaque semaine le 39 19 (7 000 pendant le 1er confinement).

C’est pour le moins un non-sens absolu, et cela risque juste de détruire un outil construit par l’engagement militant, en particulier celui du tissu militant organisé par la Fédération nationale solidarité femmes (qui regroupe 73 associations). C’est cette structure qui avait ouvert en 1992 une ligne d’écoute pour les femmes victimes de violences et qui, depuis 2007, anime le 39 19 avec l’appui d’une douzaine d’autres associations nationales. Comme le souligne l’appel, « la lutte contre les violences et la protection des femmes est une cause d’intérêt général et non une activité marchande à laquelle on peut appliquer les lois du marché. »

D’abord parce que l’écoute indispensable à l’établissement d’un cadre de confiance pour les personnes victimes est en totale contradiction avec les critères de rentabilité : time is money pour les intérêts privés. Or, « ces appels nécessitent une écoute particulière, une formation et une qualification. Il s’y joue un travail de déconstruction, avec les victimes, des mécanismes à l’œuvre dans les violences sexistes. De surcroît, l’écoute est le premier jalon de la relation de confiance. Quiconque s’est intéressé à l’emprise et aux violences conjugales sait qu’il faut parcourir un long chemin pour en sortir : la qualité de l’accompagnement lors des premiers instants est cruciale. » De plus, argumente l’appel, « le 39 19 fonctionne grâce à une connaissance fine des dispositifs de soutien aux victimes et s’appuie sur un maillage associatif dense, capable de prendre en charge les femmes pour un accompagnement à l’hébergement ou pour un appui psychologique, juridique ou social. Passer le 39 19 en "marché public", c’est prendre le risque de perdre cette richesse et de fragiliser une coordination d’associations engagées contre les violences faites aux femmes. »

C’est l’inverse de ce que fait le gouvernement qui est à l’ordre du jour : construire toutes les initiatives militantes de solidarité qui aident à libérer la parole, que ce soit par des actions de collages, des actions de visibilité, des manifs de rue ; créer des dispositifs de logement, de soutien psychologique pour accompagner les femmes dans la réappropriation de leur vie et de leurs choix.