Au moment où nous publions, la liste des signataires de cet appel n’est pas encore définitive.Il y a un an, les courageux militants égyptiens enthousiasmaient le monde. Envahissant la place Tahrir au Caire et des emplacements similaires dans d’autres métropole et villes, manifestant devant les édifices gouvernementaux et faisant grève pour gagner le minimum vital, pour les droits des travailleurs et contre des chefs corrompus, ils ont renversé un dictateur et ont développé un processus de soulèvement de masse démocratique qui a été surnommé « le printemps arabe ». Dans le même temps, la révolution égyptienne est devenue une source d’inspiration pour des millions de gens dans le monde entier.
À chaque étape du processus, des millions de gens ordinaires ont porté des coups pour les droits des femmes, pour des syndicats indépendants, pour la démocratie et la justice sociale. Mais à chaque étape, ils se sont heurtés à un appareil militaire décidé à bloquer tout changement réel. Même quand le dictateur, le président Moubarak, a été renversé, le Conseil suprême des forces armées (CSFA) a continué d’exercer le pouvoir via la loi de « l’État d’urgence », tout en réagissant à la montée révolutionnaire par des arrestations, des tortures, des passages à tabac et des assassinats. Depuis la chute de Moubarak, quelques 14 000 personnes ont été déférées aux tribunaux militaires et soumis aux coups et aux tortures qui vont avec. En conséquence, un an plus tard, le sort de la révolution est en jeu.
Ces derniers mois, les attaques du CSFA contre les jeunes, les femmes et les travailleurs sont devenues de plus en plus menaçantes. Les violences continues contre les femmes qui manifestent se sont intensifiées. L’armée a été clairement impliquée dans les agressions contre les chrétiens coptes dont vingt-quatre ont été assassinés en octobre dernier. En décembre, une escalade inquiétante des attaques de l’armée contre des manifestants pacifiques a accru le nombre des martyrs de la révolution. Entre-temps, de jeunes militants du mouvement du 6 avril ont été arrêtés et accusés d’avoir insulté l’armée et de tentative de renverser l’État, simplement pour avoir distribué des affiches contre le CSFA. Au même moment, le CSFA et le ministère de l’Intérieur ont lancé une campagne de dénigrement menaçante contre les militants de la gauche socialiste et ont envoyé l’armée mener des rafles dans les bureaux de dix-sept ONG. En agissant ainsi et avec d’autres procédés, le CSFA a clairement démontré qu’il n’a pas l’intention d’abandonner le pouvoir.
Mais les courageux Égyptiens refusent de céder face à ces attaques. Novembre et décembre ont vu d’énormes mobilisations populaires, des grèves d’enseignants, une manifestation exemplaire de 10 000 femmes déterminées au Caire et un rassemblement de 50 000 manifestants place Tahrir pour fêter la nouvelle année. Ces actions sont une source d’espoir immense pour l’avenir de la révolution populaire en Égypte.
En tant qu’écrivains, syndicalistes, universitaires et militants qui ont soutenu la révolution démocratique égyptienne, nous refusons de nous taire face à ces agressions, compte tenu notamment du silence de nos gouvernements. Nous condamnons publiquement toutes les atteintes à la liberté de parole, de réunion, de religion et d’association en Égypte. Nous demandons la libération de tous les prisonniers politiques. Nous condamnons les actions des gouvernements étrangers tels que ceux des États-Unis et de Grande-Bretagne qui font l’éloge hypocrite de la révolution égyptienne tout en fournissant au CSFA des armes et des gaz lacrymogènes pour écraser les manifestations. Nous affirmons notre solidarité avec les organisations démocratiques, syndicales, de femmes, de jeunes et socialistes qui exigent que la révolution égyptienne poursuive son chemin vers une démocratie authentique et vers la justice sociale.