Les dernières révélations du site d’investigation Disclose sont sans ambiguïté : depuis 2016, dans le cadre de l’opération « Sirli », la France « s’est rendue complice d’exécutions sommaires » et de « bombardements de civils par centaines » menés par l’Égypte de Sissi sous couvert de « lutte antiterroriste ». Ainsi, depuis 2016, l’aviation française fait des vols de reconnaissance dans le désert égyptien à la frontière avec la Libye, officiellement pour repérer des mouvements de terroristes, et fournit les renseignements à l’armée égyptienne. En fait, l’aviation égyptienne s’en sert pour bombarder des pick-ups de contrebandiers et « les forces françaises auraient été impliquées dans au moins dix-neuf bombardements contre des civils, entre 2016 et 2018 ».
Malgré les alertes lancées par les membres de la mission sur le terrain, rien n’y a fait et la mission française n’a pas été remise en cause. Il faut dire que Sissi, décoré de la grand croix de la Légion d’honneur, est un bon client : la France lui a vendu Rafale, frégates, corvettes, porte-hélicoptères, faisant de l’Égypte le quatrième client de la France avec 7,7 milliards d’euros de commandes sur la période 2010-2020. En avril dernier, un nouveau contrat pour 30 Rafale était signé, avec également des commandes de missiles MBDA et d’équipements de Safran Electronics et Defense. Au troisième rang mondial des marchands de morts, la France doit beaucoup à Sissi… et le lui rend bien.
Ces nouvelles révélations confirment à quel point le cynisme des gouvernements n’a aucune limite lorsqu’il s’agit de construire des « partenariats stratégiques »… et de faire du business. Et c’est ainsi que Macron, comme Hollande avant lui, peut se poser en donneur de leçons sur la défense des libertés et des droits humains tout en collaborant ouvertement avec les pires dictateurs de la planète, y compris dans des opérations militaires qui peuvent être légitimement qualifiées de crimes d’État. Une raison supplémentaire de refuser tous les discours patriotes et chauvins visant à tout légitimer lorsqu’il s’agirait des prétendus « intérêts de la France ».
Nos intérêts n’ont pas de nationalité, et n’ont pas de frontières, et ils sont les mêmes que ceux des peuples du monde entier, victimes de dirigeants dont il est grand temps de se débarrasser, ici comme là-bas.