Si, durant le printemps dernier, lors de la première vague du Covid-19, les personnels soignants ont été salués, applaudis et reconnus par la population pour les efforts fournis, cela ne s’est traduit aucunement par des améliorations salariales et professionnelles concrètes en automne.
Symbolisant le fameux travail dit en « première ligne », le travail des salariéEs du secteur de la santé a souvent été qualifié comme essentiel et indispensable au fonctionnement de la société. Or, il a suffi de quelques mois pour que ces dernierEs, ainsi que leurs efforts, soient largement oubliéEs. Si la société prônait impatiemment un « après Covid », un « non-retour à la normale », avec les personnels soignants revendiquant notamment des primes mais surtout une revalorisation salariale de tous les métiers dans la santé, rien de tout cela ne figure actuellement à l’ordre du jour.
Aujourd’hui, la crise sociale et sanitaire devrait recentrer le débat sur les conséquences concrètes du rouleau compresseur néolibéral sur le secteur de la santé. Cela fait des années que les personnels soignants se battent avec les syndicats contre la déshumanisation de leur travail, contre la privatisation de leurs institutions et pour des meilleures conditions de travail.
Les profits plutôt que la vie
Or, dans un système capitaliste, la logique des autorités est précisément adverse : préserver les profits, pas la vie ! Par conséquent, si pour l’économie privée, les cantons et les villes mettent en place des plans de relance économique, la logique diffère fort dans le secteur public. Dans ce cas-là, la logique dominante se traduit par les divers plans d’économie consistant à arracher des acquis et droits pourtant essentiels.
La liste devient longue : déroger à la Loi sur le travail, baisser les salaires (ponction de 1 % à Genève), baisser le nombre de lits voire fermer des sites hospitaliers entiers, rallonger les rythmes et horaires de travail (semaines de 60 heures), augmenter la cadence, supprimer les congés/vacances… S’ajoutent encore les différents projets de révision des caisses cantonales de pension, le but étant de diminuer les rentes pour travailler toujours plus.
Aujourd’hui, ce sont donc les travailleurEs en première ligne qui paient le prix de la crise. La colère de ces salariéEs, qu’on « paie » soit par les applaudissements depuis nos balcons, soit en les érigeant en héros et héroïnes, gronde. Non seulement il leur est demandé de fournir davantage d’efforts financiers, physiques et sanitaires, mais on les fait également jouer contre les chômeurEs ou salariéEs du privé, cassant ainsi toute possibilité de lutte commune.
Créer des solidarités militantes
Cette crise devrait permettre de politiser davantage les solidarités, créer des ponts, afin de construire une organisation active et combative sur les lieux de travail. S’organiser collectivement de manière permanente renforcerait et unirait le personnel pour défendre ses revendications, et son opposition aux mesures d’austérité.
C’est dans ce sens que se dirigeait l’appel lancé par le Syndicat des services publics (SSP) – soutenu par les travailleurEs dans la santé à travers le pays, comme par d’autres organisations syndicales et politiques – à se mobiliser partout en Suisse, de façon décentralisée, entre le 26 et le 31 octobre. Plus que jamais, il est nécessaire de montrer les contradictions inhérentes du capitalisme : l’hôpital n’est pas une entreprise privée pour faire des profits et la santé n’est pas « un marché comme les autres ».
Article publié dans le n°377 de solidaritéS (Suisse)