Il reste moins de deux semaines avant le premier tour de l’élection présidentielle au Brésil. Et la menace Bolsonaro continue de planer.
Il y a urgence, mais il faut faire preuve de résilience, de détermination et de patience. Le 7 septembre dernier [journée de fête des 200 ans de l’Indépendance] a été « détourné » par le bolsonarisme pour organiser de grandes démonstrations de force sociale.
Les plans de Bolsonaro
La société est fracturée : la majorité sociale contre Jair Bolsonaro s’est consolidée, prenant appui surtout sur plus pauvres, les femmes et les habitants du Nordeste, mais les fascistes conservent un soutien de la masse au sein de la bourgeoisie, des classes moyennes, une grande influence dans le Sud et le Nord et l’hégémonie dans le Centre-Ouest.
Nous sommes encore dans une situation transitoire, sortant d’une situation réactionnaire, si l’on considère le rapport de forces social entre les classes, bien que le rapport de forces politique, qui oscille de plus en plus rapidement, laisse penser que l’extrême droite est en situation croissante d’infériorité.
Jair Bolsonaro a des plans à court, moyen et long terme. Le premier objectif du 7 septembre était de stimuler une dynamique de captation d’influence pour obtenir la possibilité, le 2 octobre, d’accéder au second tour, le 30 octobre. Le deuxième était de placer son courant politique néofasciste dans un état de mobilisation afin de pouvoir construire une campagne pour dénoncer l’élection comme résultant d’une fraude. Le troisième était de garantir une légitimité lui permettant de bloquer un processus judiciaire d’enquête sur les crimes de responsabilité [concernant des actes répréhensibles du Président] qui pourrait le condamner à la prison.
La défaite de Jair Bolsonaro aux élections serait une grande victoire tactique. Mais, malheureusement, le bolsonarisme, le néofascisme à la brésilienne, restera. Le défi stratégique de la gauche doit être plus ambitieux. Il faudra inverser le rapport de forces social afin de laisser l’extrême droite démoralisée et le dos au mur. Cela nécessitera, en premier lieu, un rapport de forces politique qui garantisse les conditions de l’arrestation de Jair Bolsonaro.
Vaincre la peur
Le plus grand obstacle, jusqu’à présent, a été la difficulté pour la gauche de gagner de manière incontestée la suprématie dans les rues. Les rassemblements électoraux de Lula ont, heureusement, été importants, de l’ordre de quelques dizaines de milliers. Et même très grands dans certaines villes, notamment dans le Nord-Est. Mais sans la présence de Lula, la capacité de la gauche à battre le rappel des masses a été faible.
Il reste deux semaines avant les élections, mais très peu de personnes à gauche osent porter un autocollant soutenant Lula, en dehors des rassemblements ou des environnements sécurisés. Il n’y a pas d’autocollants sur les voitures. Pourquoi ? Parce que le danger est réel et immédiat. Les peurs politiques sont incompréhensibles, quand on ne les relie pas aux haines sociales.
Les discours de Jair Bolsonaro le 7 septembre étaient un appel au combat. Ils distillent les haines et inspirent la peur. Malheureusement, sont puissantes les pressions à l’apathie culturelle et idéologique qui enserre les larges masses laborieuses. Il s’avère qu’il n’y a pas de force sociale plus puissante dans l’histoire que la mobilisation populaire, lorsqu’elle prend confiance en elle et s’organise.
La crainte que le changement ne vienne jamais – chez les travailleurEs elle est accentuée par la peur des représailles – doit faire face à des craintes encore plus grandes : celles propres au désespoir des classes possédantes et de leur clientèle sociale de tout perdre. Dans la chaleur de la lutte des classes, le scepticisme des classes laborieuses à l’égard de leur propre force, l’indécision de leurs rêves égalitaires, ont été surmontés par l’espoir de liberté, un ressenti moral et une aspiration politique plus exaltant que la mesquinerie réactionnaire et l’avarice bourgeoise. Vaincre la peur sera l’un des grands défis à relever pour assurer la défaite des fascistes. Pendant et après les élections.
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