Publié le Jeudi 16 décembre 2021 à 13h00.

Au Brésil, Lula et le PT veulent rassurer la bourgeoisie

Lundi 29 novembre au matin, Geraldo Alckmin [ex-gouverneur de l’État de São Paulo de 2011 à 2018] a participé à une réunion avec des représentants de Força Sindical, UGT (União Geral dos Trabalhadores), CST (Central Sindical de Trabalhadores) et CTB (Central Única dos Trabalhadores), à São Paulo. L’invitation à la réunion a été faite le vendredi 26 novembre et a été rapidement acceptée. La réunion a été marquée par des déclarations de soutien à la proposition adressée à Alckmin – qui quitte le PSDB (Partido da Social Democracia Brasileira) – d’être le vice-président de Lula pour les élections de 2022.

Alckmin a déclaré qu’il s’était préparé, à nouveau, à se présenter comme gouverneur de l’État de São Paulo, mais que « l’hypothèse fédérale se présentait » : « Je me suis à nouveau préparé pour être gouverneur de l’État São Paulo. Mais l’hypothèse fédérale [le ticket Lula-Alckmin] s’est présentée. Les défis sont grands. Cette hypothèse est en voie de réalisation et je considère que cette réunion avec les quatre principales centrales syndicales est historique. »

L’initiative même de ces centrales syndicales à la recherche d’une convergence Lula-Alckmin indique que nous n’en sommes plus à un échange de civilités entre Alckmin et Lula. Le leader du Parti des travailleurs du Brésil (PT) n’a pas fait de déclaration. Cependant, des dirigeants importants du parti – comme le sénateur Jaques Wagner (sénateur de l’État de Bahia, dont il fut aussi le gouverneur) – se sont prononcés en faveur de cette proposition.

Une erreur historique

Lula et le PT recherchent Alckmin afin de calmer la bourgeoisie et de dégonfler les tentatives des secteurs du capital de présenter une candidature de « troisième voie ». L’approche du PT et de Lula constitue une importante erreur : les gestes de la gauche pour gagner la « confiance » de la droite ne garantissent rien. Dilma Rousseff, après sa réélection [en 2014], a nommé une personne issue du monde de la finance à la tête du ministère de l’Économie 1. Joaquim Levy a appliqué un plan d’ajustement structurel sévère en 2015, ce qui n’a pas empêché la classe dirigeante, dont Alckmin et le vice-président de l’époque, Michel Temer, de soutenir le coup d’État constitutionnel de 2016 contre Dilma Rousseff.

Les alliances avec la droite conduisent à la renonciation au programme de la gauche. Pour gagner la « confiance » de la bourgeoisie, Lula ne pourra pas s’engager, par exemple, à abroger l’héritage du coup d’État de 2016. La contre-réforme de la sécurité sociale et du travail, les privatisations, toutes les attaques démocratiques et sociales appliquées dans la dernière période, ne devraient-elles pas être annulées par un nouveau gouvernement de gauche ? Comment répondre aux revendications (portant sur l’alimentation, l’emploi, le logement, l’éducation, la santé, le droit à la vie et à la culture) de la population laborieuse et opprimée, en s’alignant aux côtés d’Alckmin, le bourreau du peuple de Pinheirinho 2 ? Comment combattre en profondeur le racisme structurel, qui est à l’origine de nos inégalités sociales abyssales, sans affronter en profondeur les privilèges séculaires de la bourgeoisie ?

Continuer sur cette voie signifie abandonner le programme de défense des masses populaires et de changements structurels du pays, provoquant le découragement dans les rangs de la gauche, suite à un programme réduit dans le but de plaire aux « élites ». Une orientation qui implique une capacité amoindrie de susciter l’enthousiasme de la classe ouvrière en vue de perspectives de changements. Plus que jamais, il est nécessaire de se battre pour une candidature unie de la gauche, sans Alckmin et la droite.

1 – Joaquim Levy, président de Bradesco Asset Management, filiale de Bradesco, la deuxième banque privée du Brésil.

2 –

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