Publié le Dimanche 27 janvier 2013 à 18h11.

Égypte : la révolution à un tournant

Deux ans après le déclenchement de la révolution égyptienne, les aspirations fondamentales des masses populaires qui se sont soulevées et ont chassé Hosni Moubarak restent insatisfaites. Une large majorité de la population ne voit toujours pas d’amélioration de ses conditions de vie.La continuité avec la politique de MoubarakAinsi la paupérisation, le chômage, la misère – plus d'un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté –, les inégalités, qui étaient les principales causes du déclenchement de la révolution continuent à sévir, sinon à s’aggraver par la corruption généralisée et les abus de pouvoir, comme en témoigne le rapport de Transparency International.Les Frères musulmans se situent dans le cadre de l’économie néolibérale au service des milliardaires de l’ancien et du nouveau régime, ainsi que des grandes puissances financières de la planète. Le pays continue à être soumis aux choix politiques et économiques du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale. Ces institutions financières internationales accablent le pays par le biais des mécanismes de la dette, le blocage de toute rupture avec les politiques passées et une série de réformes économiques qui appauvrissent encore davantage les plus démunis. La population réalise peu à peu qu’avec les Frères musulmans rien ne change au niveau économique et social.

Les Frères musulmans répriment et torturent les manifestantsLe régime en place recourt aux mêmes procédés répressifs que l’ancien régime, donne le feu vert aux forces de sécurité pour tirer à balles réelles contre les manifestants pacifiques et lâche ses milices contre ses opposants pour les violenter à coups de sabre et de couteau. Cela a fait perdre les illusions même à des proches des cercles fréristes. Les attaques contre le sit-in des opposants à Morsi devant le palais présidentiel, les scènes de brutalité, les militants et militantes ensanglantéEs, les morts… ont rappelé la tristement célèbre bataille des chameaux en février 2011. De nombreux manifestants ont été pris à partie, tabassés et torturés par des membres des milices islamistes, dans certains cas en présence de membres des forces de sécurité, n’épargnant ni femmes ni personnes âgées. Des médecins ont refusé d’apporter des soins à des blessés, les considérant comme des mécréants indignes de secours.

L'opposition au régimeDepuis la chute de Moubarak, les révolutionnaires et les libéraux n’ont jamais réussi à former une alliance tactique solide autour d’une plateforme minimale ne serait-ce que de libertés démocratiques et pour avancer sur le terrain et s’opposer aux forces rétrogrades.Les événements récents ont rapproché les différentes composantes de l'opposition. Elles se retrouvent notamment dans les actions de rue. Certains d'entre elles réclament aujourd’hui le départ du président Morsi et de son pouvoir au service des Frères musulmans. Tout cela inquiète le pouvoir en place. Pour cette raison, le président égyptien a, par un décret, autorisé l’armée à appuyer les services de sécurité dans leur mission de maintien de l’ordre, en leur donnant notamment le pouvoir d’arrêter des manifestants.

Quelles perspectives pour la révolution ?Les plus grandes cylindrées de l’opposition égyptienne ne proposent pas une vraie alternative politique en rupture avec l’ancien régime, le régime en place et le projet sociétal islamiste. L’opposition radicale qui englobe des courants d’extrême gauche, des syndicalistes, des féministes et des jeunes, ne réussit malheureusement pas pour le moment à créer un rapport de forces réel dans la société.Depuis deux ans, les luttes n'ont pas cessé sur les questions sociales ou démocratiques. Reste à les coordonner et que se dégagent des mots d’ordre permettant une autre dynamique porteuse d’espoir.Adaptation pour Tout est à nous ! d'un article de « Maghreb en lutte » publié par la LCR de Belgique.