Publié le Mardi 19 janvier 2021 à 14h12.

En Belgique, justice pour Ibrahima et touTEs les autres

Nous étions plus de 500 ce mercredi 13 janvier à nous rassembler devant le commissariat de Saint-Josse pour exiger justice pour Ibrahima.

Les faits se sont déroulés le samedi 9 janvier un peu avant 19h : alors qu’il filmait une intervention policière, la police a décidé d’arrêter Ibrahima. Ayant probablement peur que cela finisse mal étant donné que la police n’a pas le droit d’arrêter une personne qui filme, il nous semble compréhensible qu’Ibrahima ait préféré fuir. La police l’a rattrapé et arrêté. Il a été emmené au commissariat et est mort quelques heures plus tard à l’hôpital. Alors que son décès a été acté à 20h22 par un médecin, la famille n’a été prévenue qu’à 2h30 du matin dans la nuit de samedi à dimanche.

Un système répressif, raciste et meurtrier

Dès dimanche, le « bouche à oreille » des réseaux sociaux diffusait l’information partout : suite au décès d’Ibrahima, un appel à un rassemblement était lancé pour mercredi. L’information était déjà connue d’un grand nombre de personnes avant que les grands médias ne décident d’en parler.

En deux jours, c’est donc une mobilisation massive, mise en place notamment grâce aux outils de communication d’une jeunesse qui n’attend pas l’information mais s’empare du sujet, des faits, les analyse et les diffuse.

Nous étions là, présents avec la Gauche anticapitaliste au côté de plusieurs centaines de personnes venues exiger que toute la lumière soit faite et que justice soit rendue à Ibrahima et sa famille mais pas uniquement : la masse de jeunes informés des nombreux homicides récents de la part de la police ne voulait pas en rester là. Les personnes présentes (avec également la présence de militantEs antiracistes, de gauche ou de membres d’autres familles victimes de la police) sur place avaient conscience qu’il ne s’agit pas d’un cas isolé et dénonçaient un système répressif, raciste, meurtrier et une justice qui ferme les yeux.

Un groupe de jeunes était présent avec une pancarte rappelant les noms de quasiment toutes les victimes d’homicides de la police en Belgique ces dernières années, et c’est tout naturellement que les participantEs au rassemblement ont scandé des slogans pour réclamer justice pour touTEs.

112 arrestations

Alors que la presse s’est empressée de diffuser la fausse information (selon une source anonyme dont on se doute de la provenance) selon laquelle Ibrahima avait consommé de la drogue et que cela aurait provoqué un arrêt cardiaque, l’avocat de la famille a pris la parole pour rétablir la vérité. Les premiers résultats de l’autopsie révèlent qu’il n’avait pas pris de drogue. Pire, les images de vidéosurveillance dans le commissariat montrent qu’Ibrahima perd connaissance et que personne ne lui porte secours pendant cinq à sept minutes.

Le rassemblement de mercredi était bien politique. Lors d’une prise de parole, la question a été posée : qui sera le ou la prochainE ? Il apparaît pour nombre des participantEs que si rien ne change, la situation se reproduira et la prochaine victime pourrait être unE proche ou soi-même.

Nous pouvons donc comprendre la colère qui s’est exprimée à la fin du rassemblement et refusons de condamner leur ras-le-bol. Des émeutes ont éclaté mais elles ont été déclenchées par une nouvelle mort inacceptable et une compréhension que la justice protège la police. Du mobilier urbain a été détruit, quelques voitures de police ont été dégradées et il y a eu une antenne de commissariat de police en feu.

Au total ce sont 112 personnes qui ont été arrêtées suite à l’émeute. Une nouvelle réponse répressive et violente envers une jeunesse qui exprimait sa rage face à un système meurtrier impuni.

Ce rassemblement doit en appeler d’autres et il est maintenant nécessaire de s’organiser. Nous n’avons rien à attendre des représentants des partis institutionnels qui s’émeuvent pour leur communication ou d’autres qui font l’autruche. Nous avons tout à construire pour refuser ce système et amener des alternatives.

Une mobilisation à soutenir et à construire

Avec la Gauche anticapitaliste nous défendons et encourageons :

  • Ce rassemblement du 13 janvier 2021 en soutien inconditionnel à la famille et aux proches d’Ibrahima, ainsi qu’à toutes les victimes de violences policières ;

  • À dénoncer, témoigner et déposer plainte en cas de violences ou d’abus de la police sur le site policewatch.be ;

  • La construction d’un mouvement large et unitaire de lutte contre ces violences policières qui visent plus particulièrement les personnes racisées, les personnes LGBTQI+, les femmes, les militantEs ;

  • Un mouvement large et unitaire rassemblant toutes les victimes de violences policières et toutes les organisations et personnes souhaitant mettre fin à cette impunité policière.

Nous mettons en avant les mesures d’urgence suivantes pour mettre un coup d’arrêt à ces violences systématiques :

  • Le désarmement de la police dans la perspective de son abolition future ;

  • Une commission indépendante de contrôle démocratique et citoyen de la police : c’est à la population que la police doit rendre des comptes, pas au pouvoir en place ;

  • Le maintien du droit de filmer l’action policière dans tous les cas : empêcher de filmer et de diffuser des images de violences policières, c’est livrer les victimes à encore plus d’arbitraire ;

  • La suppression des SAC (sanctions administratives communales) qui dépouillent le plus souvent les jeunes, les personnes racisées et les classes populaires ;

  • La fin de l’impunité policière et la gratuité effective à 100% de la justice pour touTEs.