À mi-mandat, la charge symbolique positive du métissage afro-américain d’Obama fait de moins en moins d’effet.Obama est en mauvaise posture. Les Démocrates espérant se faire réélire au Congrès (Chambre des Représentants et Sénat) en novembre prochain, ne s’y trompent pas et font campagne en se distanciant le plus possible des choix politiques du président, sur le plan de réforme de l’assurance maladie comme sur la politique budgétaire. La question du déficit public, qui n’est en soi ni de droite ni de gauche, a pris le pas sur tout autre enjeu de politique intérieure, au point que l’économiste Paul Krugman a déploré dans le New York Times « l’échec national cuisant » consistant pour le gouvernement à « accepter le chômage de masse comme un état de fait ». Le gel des dépenses publiques est devenu une priorité pour Obama depuis quelques mois, à l’exclusion des dépenses dites essentielles : budget de la Défense, des Anciens combattants et de la Sécurité intérieure. Les programmes sociaux (Medicare, Medicaid et le système de retraites Social Security) pour les plus démunis ne devraient pas être touchés, si ce n’est qu’Obama n’exclut pas la mise en place d’une commission bipartisane pour réfléchir, avec les Républicains, à la façon d’en réduire le coût global. Selon Krugman, le déficit public représenterait 78,7 % du PIB en 2020. Or ce ne sont pas les aides sociales aux plus pauvres, par ailleurs bien maigres, qui en sont la cause, mais bien les aides fédérales aux plus riches. Outre le budget pharaonique de la Défense, la structuration du système d’imposition américain a fortement contribué à creuser la dette. Sous George W. Bush, les exonérations d’impôt pour les plus riches s’étaient élevées à plusieurs milliers de milliards (1,3 trillion) de dollars. Obama prévoit de mettre fin à ces cadeaux fiscaux, tout en reprenant l’argument cher aux Républicains selon lequel les allègements fiscaux encourageraient la création d’emplois. Pourtant, au plus haut du boom économique des années 1950 et 1960, les entreprises payaient un tiers de l’impôt fédéral et le taux d’imposition des personnes les plus riches (revenus supérieurs à 370 000 dollars) était de 90 %, contre 35 % aujourd’hui. Le projet de loi de réforme du système bancaire actuellement en débat au Congrès est une indication supplémentaire de la tendance conservatrice de la gouvernance Obama. Le projet ne réinstaure pas le système de protection post-Grande Dépression (loi Glass-Steagal Act de 1933), qui avait déclaré incompatibles les métiers de banque de dépôt et d’investissement. Un système fédéral d’assurance des dépôts bancaires avait alors été créé. Ces mesures furent abrogées en 1999 et menèrent à la crise financière actuelle. Rien, dans le projet législatif du gouvernement, n’indique une volonté de placer les banques sous un quelconque contrôle étatique. En avril 2009, un amendement permettant d’allonger l’échéancier de remboursement pour plus d’un million de familles (Cramdown Amendement), a été mis en échec. Depuis, rien dans la politique d’Obama n’a prouvé une volonté d’inverser la tendance et de placer, même symboliquement, les travailleurs et les plus pauvres au cœur de la démarche du gouvernement fédéral. Ambre Ivol
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