Dans une étude publiée le 11 décembre, les chercheuses Sabine Lee et Susan Bartels jettent une lumière crue sur la réalité de l’exploitation sexuelle des populations locales par les casques bleus entre 2004 et 2017, missionnés dans le cadre de la Minustah (Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti).
Titrée « Ils te mettent quelques pièces dans la main pour te planter un bébé dans le ventre », cette étude établit qu’un système d’exploitation sexuelle et de viols à grande échelle a existé à Haïti, impliquant des milliers de femmes, dont les plus jeunes avaient 11 ans. Au moins 265 enfants sont nés de ces abus, surnommés les « petits Minustah », et abandonnés avec leurs mères lors du départ des casques bleus en 2017.
Des cas de prostitution forcée et de viols, impliquant parfois des enfants, avaient déjà été établis. C’est ainsi qu’en 2007, près de 150 soldats sri-lankais avaient été renvoyés d’Haïti suite à la révélation de l’existence d’un réseau de prostitution infantile, sans toutefois être inquiétés, ni par l’ONU ni par la justice du Sri Lanka. On se souvient également du scandale qui a touché l’an dernier l’ONG Oxfam, concernant là encore des abus sexuels, qui avait débouché sur le renvoi ou la démission de sept salariés de l’ONG.
Ce qui frappe dans l’étude publiée cette année, c’est l’ampleur du phénomène, qui confirme les violences dont se rendent coupables les soldats, quels que soientsoit la couleur de leur casque et le pays dans lequel ils interviennent. Comme l’a expliqué Susan Bartels à Libération (21 décembre), « face à un soldat qui a de l’argent, des ressources, et une arme, il y a tout de suite une relation de pouvoir qui s’installe. Il est très difficile de parler de consentement quand les jeunes filles et femmes ont des relations sexuelles pour leur survie. »