Où s’arrêtera l’État d’Israël ? Et surtout, qui osera l’arrêter ? On est en droit de se poser une fois de plus la question au vu de l’actualité de ces dernières semaines, durant lesquelles Israël a multiplié les exactions contre les Palestiniens et les déclarations arrogantes vis-à-vis, notamment, de l’ONU.
L’information ne fait plus la « une » des journaux, mais le soulèvement silencieux de la jeunesse palestinienne se poursuit.
160 morts depuis octobre
Manifestations et attaques contre l’armée et les colons sont quasi-quotidiennes dans les territoires palestiniens occupés, et la répression israélienne ne faiblit pas, avec des centaines d’interpellations, des milliers de blessés et 160 morts, côté palestinien, depuis le mois d’octobre – contre 25 victimes israéliennes. Une agitation et une répression qui participent de l’impossible stabilisation d’une situation coloniale, et qui témoignent du refus, notamment du côté de certains secteurs de la jeunesse palestinienne, d’accepter l’inacceptable. Nous sommes certes bien loin d’une nouvelle « Intifada », que la faible structuration et le compréhensible pessimisme de la population des territoires occupés empêchent, mais l’ordre colonial est contesté.
« L’ONU encourage le terrorisme »
À un point tel que même le Secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, pourtant peu suspect de radicalisme, a établi le 26 janvier un lien entre les « attaques » palestiniennes et la politique israélienne au cours d’un discours condamnant la colonisation : « Comme les peuples opprimés l’ont démontré tout au long de siècles, il est dans la nature humaine de réagir à l’occupation, qui sert souvent d’incubateur puissante à la haine et l’extrémisme. » Fureur de Netanyahou qui, avec son sens inné de la nuance, a accusé Ban Ki-moon d’« encourager le terrorisme ». Un vif échange qui fait suite à l’annonce, début janvier, de la démission du Rapporteur spécial de l’ONU sur la situation des droits humains dans les territoires palestiniens , auquel Israël refusait, depuis sa prise de fonction en juin 2014, l’entrée… dans les territoires palestiniens.
Coloniser et détruire
L’Union européenne a elle aussi été récemment humiliée par Israël, qui a détruit au début du mois de février des infrastructures palestiniennes financées par des fonds européens. Face aux protestations, l’ambassadeur d’Israël à l’ONU a lui aussi fait montre de sa subtilité, accusant l’Europe de « dépenser des centaines de millions de dollars pour un plan de constructions illégales ». Venant d’un représentant d’un État qui prévoit, selon l’ONG La Paix Maintenant, de construire 55 000 nouveaux logements dans les colonies, la dénonciation des « constructions illégales » pourrait faire sourire si elle ne faisait pas écho à une politique systématique de déplacement de la population palestinienne et à des tragédies quotidiennes sur le terrain.
Jusqu’à quand ?
L’arrogance israélienne n’est en réalité guère surprenante. En effet, au-delà des déclarations outrées et de quelques mesures symboliques, on est aujourd’hui bien loin de quelconques sanctions contre l’État d’Israël, qui n’a donc aucune raison de se priver de coloniser, détruire, réprimer et provoquer. Dans une telle situation, le développement de la campagne internationale BDS contre l’État d’Israël est la meilleure réponse à l’hypocrisie et à la couardise des institutions internationales et des grandes puissances, dont le « double discours » apparaît de plus en plus méprisable. Et la criminalisation de cette campagne en France, assumée par Manuel Valls lui-même, n’en est que plus pathétique, cynique et révoltante.
Julien Salingue