La résolution de l’ONU a l’égard du gouvernement syrien n’empêche pas celui-ci de continuer de massacrer la population révoltée. Les tentatives de récupération par l’Arabie saoudite et le Qatar compliquent davantage la tâche aux révolutionnaires. Mais la lutte continue pour mettre fin au régime d’Assad.En treize mois de révolution syrienne, la présidence du Conseil de sécurité de l’ONU avait fait trois déclarations. Cette fois-ci, le Conseil a finalement adopté le 14 avril la résolution n° 2042 avec l’approbation des gouvernements russe et chinois. Elle autorise le déploiement d’observateurs dans le pays. Cinq parmi eux sont déjà arrivés dès le lendemain et à terme on attend… 30 observateurs.
Au terme d’une escalade féroce de la répression dans plusieurs villes syriennes, le gouvernement syrien avait annoncé unilatéralement un cessez-le-feu le 12 avril. Mais ses opérations militaires n’ont aucunement été arrêtées.
La résolution 2042 s’inscrit à la suite de la nomination de Kofi Annan en tant qu’émissaire spécial pour la Syrie mandaté par l’ONU et la Ligue des États arabes. Il a présenté une initiative en six points : l’arrêt de la violence de toutes les parties, le retrait de l’armée des villes, la libération des prisonniers, la permission d’entrée des médias et journalistes, et l’ouverture d’un dialogue entre le gouvernement syrien et l’opposition.Le vendredi 13 a connu une augmentation significative des manifestations contre le régime, les comités locaux de coordination ont relevé 750 points de départs de contestation.
Le 14, les forces armées du pouvoir en place ont tiré à balles réelles pendant les funérailles des manifestants tués la veille à Alep, tuant à nouveau une vingtaine de civils. Les bombardements ont repris contre les quartiers rebelles de Homs, Idlib, Deraa et dans la campagne autour de Damas.
La mission de Kofi Annan reflète, en réalité, un compromis – certes changeant – entre les grandes puissances, américaine et européenne d’un côté, et russe et chinoise de l’autre. Mais la révolution syrienne n’a pas seulement une dimension internationale, due à l’importance géostratégique de la Syrie, elle revêt aussi une dimension régionale, d’où la position visiblement plus agressive des pays réactionnaires arabes avec à leur tête le cœur de l’obscurantisme dans la région, à savoir l’Arabie saoudite et son acolyte le Qatar qui essaient de créer une alliance avec le gouvernement turc en vue d’armer massivement et lourdement les quelques petits groupes armés qui leur sont proches. Ils poussent de même l’armée turque à créer une zone « sécurisée ». Mais cette démarche est restée infructueuse jusqu’à ce jour. Or ces pays réactionnaires cherchent à récupérer la révolution syrienne ou la dévier de sa trajectoire pour au moins deux raisons : briser l’axe Téhéran-Damas pour affaiblir l’Iran, et empêcher la victoire d’une révolution sociale et démocratique en Syrie pour qu’elle ne devienne pas un exemple à suivre pour leurs peuples.
Vendredi dernier, la journée des manifestations a été placée sous le mot d’ordre « Une révolution pour tous les Syriens ». C’est la marque d’une maturité politique qui fait échec à la tentative de récupération. Notons au passage que l’influence médiatique et politique du Qatar et de l’Arabie saoudite par le biais de leurs moyens de propagande Aljazeera, Alarabya et autres « médias », a été largement affaiblie et discréditée aux yeux des masses révoltées. Il en va de même pour leur protégé, le Conseil national syrien, qui s’est transformé malgré leur soutien massif en une peau de chagrin, il n’est aujourd’hui qu’un bureau de presse.
C’est le temps de la désillusion, le peuple syrien révolté face à un régime sanguinaire, a concrètement et dans le sang appris à reconnaître ses vrais amis de ses ennemis, il a pu tester l’impasse dans laquelle ont tenté de le pousser les forces de « la contre- révolution ».
La classe ouvrière et les exploités sont au cœur de la révolution. Pour cette raison, la dictature a licencié plus de 85 000 ouvriers de janvier 2011 à février 2012, et a fermé 187 usines (selon des chiffres officiels), pour casser une dynamique contestataire propre à la classe ouvrière en Syrie.
Si nous sommes contre toute intervention militaire en Syrie, bien qu’elle soit à l’heure actuelle hypothétique, nous sommes, et sans conditions, solidaires de la révolution populaire syrienne. La position de quelques groupes de « gauche » qui mettent seulement l’accent sur la condamnation d’une intervention militaire impérialiste et l’implication des pays réactionnaires arabes, n’est autre chose aux yeux des militants de la gauche révolutionnaire syrienne, qu’un soutien à une dictature bourgeoise et sanguinaire et une trahison du combat des masses laborieuses et exploitées pour la liberté, l’égalité et la justice sociale.
Vive la révolution syrienne ! Vive le socialisme par en bas !
Ghayath Naisse