Publié le Mardi 21 mai 2019 à 18h25.

Le droit à l’avortement remis en cause aux Etats-Unis

L’Alabama, un des états les plus conservateurs, a voté mercredi 15 mai une loi qui interdit quasi totalement l’avortement, même dans des cas de viol ou d'inceste, et qui prévoit des peines allant jusqu'à l'emprisonnement à vie pour les médecins qui pratiqueraient l’IVG. Le Missouri, état rural et religieux du centre du pays, a voté une loi très restrictive vendredi 17 mai et des lois similaires ont été votées en Géorgie, dans l’Ohio, le Kentucky ... État par État, les dispositions spécifiques se sont multipliées, contribuant à circonscrire l’application du droit à avorter.

Aux Etat-Unis, il n’existe pas de loi équivalente à la loi Veil en France. Le droit à l’avortement se fonde sur une interprétation du 14è amendement de la Constitution qui garantit « le droit à l’intimité » (« right to privavy »). En 1973, la Cour suprême l’avait étendu au droit pour les femmes de décider d’avorter. Mais cette jurisprudence peut être cassée. Les anti-avortements qui se sentent le vent en poupe après l’élection de Trump sont repartis en guerre et veulent pousser les 9 juges de la cour suprême à réétudier l’arrêt de 1973 et revenir sur le droit à l’avortement qu’il autorise.

Y-a-t’il un risque que l’avortement soit interdit ?De fait il est déjà largement remis en question et menacé.En pratique, 42 États exigent que l’IVG soit pratiquée par un médecin agréé, et parfois dans un hôpital, 19 imposant même un deuxième avis médical. Encore faut-il que la patiente puisse effectivement trouver les professionnels ou l’établissement idoine dans un périmètre raisonnablement accessible.42 États, encore, autorisent les hôpitaux à refuser de pratiquer les avortements. 43 États fixent une limite, en général autour de 24 semaines de grossesse, après laquelle l’avortement est interdit, sauf quand la santé ou la vie de la mère sont menacées. 20 États ont même adopté le Partial-Birth Abortion Act, promulgué par le président Bush en 2003, qui proscrit l’interruption médicale de grossesse, au-delà du stade de viabilité du fœtus, et quelque soit son potentiel de survie.

Cependant les ultraconservateurs n’ont pas encore gagné la partie ! 71 % des Américain-E-s approuvent la jurisprudence en vigueur et l’opposition à ces lois régressives s’amplifie. Les anti avortements sont une minorité. La puissante organisation de défense des droits civiques ACLU a déjà fait savoir qu'elle saisirait la justice pour empêcher l'application de ce texte voté en Alabama, tandis que la National Organization for Women a qualifié la loi d'"inconstitutionnelle", estimant que sa mise en application "renverrait les femmes de l'Etat aux jours noirs durant lesquels les parlementaires contrôlaient leur corps, leur santé et leur vie". La mobilisation grandissante des femmes aux Etats-Unis comme dans le monde est là pour défendre ce droit fondamental.Domi P.