Le nord du Mali a de nouveau connu un embrasement de violence entre les groupes rebelles et les Fama (Forces armées maliennes) qui, après une journée d’intenses combats, ont dû capituler. Cela accentue la situation d’instabilité du pays.
Le conflit a commencé lors de la visite du nouveau Premier ministre Moussa Mara nommé il y a à peine quelques semaines. Le MNLA, mais aussi le HCUA (Haut conseil pour l’unité de l’Azawad) qui rassemble une grande partie des anciens du mouvement islamiste d’Ansar Dine, et le Mouvement arabe de l’Azawad (MAA), ont attaqué la délégation de la primature provoquant 36 morts. Le gouvernement malien a directement réagi en parlant de déclaration de guerre et a envoyé plusieurs centaines de soldats des Fama avec pour objectif de reprendre la ville. Cette offensive militaire a tourné rapidement au désavantage de l’armée malienne. Il semblerait que les groupes rebelles épaulés par des djihadistes en auraient profité pour reconquérir certaines villes du nord-est comme Ménaka et Anéfis. Cette crise n’est que le prolongement d’une situation qui se tend au fil des jours entre les groupes armés au nord du Mali et Bamako.
Des négociations difficilesLes accords de Ouagadougou, qui restent le cadre juridique dans lequel les négociations finales doivent se dérouler, avaient pour principal objectif un cessez-le-feu pour assurer la tenue des élections. Depuis qu’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) a été élu, les négociations n’ont jamais réellement démarré et restent difficiles pour plusieurs raisons dont la multiplicité des groupes armés qui n’ont pas forcément les mêmes objectifs. La médiation qui au début était assurée par Blaise Compaoré du Burkina Faso, s’est diversifiée avec l’entrée en jeu des Algériens proches de Bamako, puis des Marocains plus proches du MNLA, et un pays exotique, du moins dans cette région, la Suisse... En face, le gouvernement d’IBK qui a été élu massivement par la population est en train de décevoir : la situation sociale au Mali reste catastrophique et plusieurs affaires sont en train d’entacher sa probité et la bonne gouvernance, pour reprendre les termes du FMI et de la Banque mondiale. Pour répondre à une grande majorité de la population, IBK se doit d’être sur une ligne dure vis-à-vis des groupes rebelles. La défaite de l’armée malienne crée évidemment une nouvelle situation : elle renforce la position des groupes armés du nord, favorise la pénétration des groupes djihadistes dans la région et va rendre plus dépendant IBK de la Minusma, les troupes africaines de l’ONU, et de la France. Dès le début du processus de réconciliation, les populations en ont été écartées. C’est aussi le cas pour les négociations qui pourtant vont discuter de l’avenir de leur région. Mais sur ce point, gouvernement et groupes armés sont d’accord. Il est clair que les discussions vont tourner autour d’un approfondissement de l’autonomie de la région du nord du Mali. L’enjeu pour certains groupes armés est leur capacité à faire main basse sur une partie du territoire pour contrôler les flux commerciaux, qu’ils soient légaux ou illégaux... Une solution pérenne serait que les populations soient écoutées et que les fonds servent réellement à appuyer les projets économiques des populations. Cela implique qu’elles puissent contrôler effectivement l’affectation de l’argent reçu.
Paul Martial