À l'Assemblée nationale et au Sénat, il n'y a pas eu une seule voix pour s'opposer à la prolongation de l'opération militaire Serval. Et ce n'est pas l'abstention quasi silencieuse des députés du Front de gauche qui a menacé cette belle unité nationale. « Garde-à-vous et rompez les rangs », l'armée s'occupe du reste !Les seules inquiétudes des parlementaires ont porté sur le coût de l'intervention (plus de 200 millions d'euros). Le chef de file des députés PS, Le Roux, a plaidé pour que cette somme soit « prise en compte par l'Union européenne dans le calcul des déficits autorisés des États ». D'autres ont défendu que le budget de la défense devait être maintenu « à un niveau suffisant ». Pas d'austérité pour les marchands de canon ! Car rien ne vaut une intervention militaire pour « renforcer de façon singulière la puissance d'influence de la France », comme l'a déclaré sans ambages Fabius, ministre des Affaires étrangères.Pourquoi alors prolonger cette opération qu'Ayrault qualifie de « réussite politique et militaire » ? Après tout, sans être totalement éradiquées, les bandes armées djihadistes ont été repoussées en dehors du Mali et le président Traoré n'a pas été renversé par un coup d’État. Si l'armée française ne plie pas bagage, c'est que derrière les objectifs affichés de l'opération Serval, il y a d'autres préoccupations de l'impérialisme français.À l'ONU, la France se démène pour remettre le sort du Mali dans les mains d'une « mission de maintien de la paix » composée de 11 200 soldats africains. Mais elle maintiendra toujours 1 000 soldats sur place. Le but est de faire supporter à la communauté internationale le coût d'une mise sous tutelle du Mali, tout en s'assurant qu'à la moindre menace sur la stabilité de l’État malien (qu'elle provienne de groupes armés ou de révoltes populaires) l'armée française pourra intervenir rapidement.Toujours opposéEs à cette guerreEn fait, la situation au Mali est loin d'être stabilisée. La possibilité d'organiser des élections présidentielle et législatives en juillet comme l'avait affirmé Hollande, s'éloigne de plus en plus. Le MNLA, principal mouvement nationaliste touareg, qui contrôle une partie du nord du Mali, dont la ville de Kidal, refuse de rendre les armes et ne veut pas entendre parler d'élections. Il y avait « deux » Mali avant Serval, il y en a toujours deux. Au nord, l'administration centrale n'est pas réinstallée et les populations qui ont fui ne sont pas revenues. 170 000 Maliens sont réfugiés dans les pays voisins, dont 75 000 en Mauritanie, qui survivent en plein désert dans des conditions très précaires. Dans le camp de Mbéra, le manque d'eau est tel que deux enfants y meurent chaque jour.L'opération Serval a permis de sauvegarder les intérêts de la France dans cette zone de l'Afrique, hautement stratégique. Mais elle s'avère un facteur d'instabilité permanente supplémentaire à l'intérieur du Mali et ailleurs en Afrique, comme l'attentat contre l'ambassade de France à Tripoli vient de le souligner. Alors, plus que jamais, même si nous sommes peu nombreux à le dire : « troupes françaises, hors du Mali et hors d'Afrique » !Marie-Hélène Duverger