Voilà près de deux mois que Moussa Tchangari a été arrêté, suscitant de nombreuses protestations.
Mis au secret pendant 48 heures, Moussa Tchangari, secrétaire général de l’ONG Alternative Espace Citoyenne (AEC), a été transféré au « service central de lutte contre le terrorisme » sous les inculpations d’« atteinte à la sûreté de l’État », « association de malfaiteurs en lien avec le terrorisme » et « apologie du terrorisme ».
Au service du peuple
Le doyen des juges d’instruction lui a notifié deux nouvelles charges, celle « d’intelligence avec des puissances ennemies » et celle « d’atteinte à la défense nationale ». Il a été déplacé à la prison de Filingué à 180 km de la capitale Niamey.
Amnesty International qualifie à juste titre Moussa « d’éminent leader de la société civile ». Dans les années 1980, il a été un des dirigeants de l’Union des Scolaires nigériens et s’est battu pour l’obtention des droits démocratiques. Il a été un des responsables de la Coalition contre la vie chère en 2005, organisant des manifestations de plus de 100 000 personnes. Il a milité sans répit pour la défense de la souveraineté du Niger alors que les pouvoirs successifs bradaient l’exploitation des mines d’uranium à la multinationale française AREVA (anciennement COGEMA) devenue ORANO. Plusieurs fois, il a connu la prison, comme en 2015 quand il était déjà accusé « d’atteinte à la défense nationale ». Une confirmation que les dictatures se suivent et se ressemblent.
Répression et démagogie
Quelques semaines après le coup d’État mené par le général de la garde présidentielle Abdourahamane Tiani en juillet 2023, Moussa Tchangari prévenait des risques que le pays encourait : « Le devoir de tous ceux et celles qui se soucient du devenir du Sahel n’est donc pas seulement, dans ces conditions, de s’opposer à la prise du pouvoir par la force et aux dérives autoritaires que l’on observe déjà ; mais aussi, de rejeter fermement la prétention des militaires à faire aboutir l’option du “tout-sécuritaire” qui a échoué avec les pouvoirs civils. »
Aucun discours différent du pouvoir n’est accepté : les journalistes sont emprisonnés, les opposantEs sont déchuEs de leur nationalité. Quant à l’ancien président, il reste arbitrairement enfermé depuis le coup de force il y a 18 mois.
De nombreux appels pour la libération du secrétaire de l’AEC ont été publiés. Parmi les signatures, on retrouve les organisations de défense des droits humains, des universitaires, des militantEs altermondialistes et des organisations africaines anti-impérialistes comme le parti malien Solidarité africaine pour la démocratie et l’indépendance (SADI), lui aussi victime de la répression des putschistes.
Pendant que Tchangari menait son long combat pour la défense des droits humains et la souveraineté du Niger, Tiani lui, servait les dictatures en place avec la docilité requise lui permettant d’évoluer de soldat de deuxième classe au grade de général, avant de se découvrir à point nommé une fibre nationaliste et panafricaniste… idéale pour justifier son coup d’État.
Paul Martial