Le 12 janvier dernier, dans l’État espagnol, douze avocats qui défendent des prisonnierEs politiques basques ont été interpellés au Pays basque et en Navarre, ainsi que quatre membres d’Herrira (collectif de soutien des prisonniers, « illégalisé » depuis septembre 2013). Ils sont accusés de collaboration ou appartenance à une organisation terroriste.
Rappelons d’abord qu’ETA a cessé définitivement la lutte armée depuis plus de trois ans et a réitéré plusieurs fois sa participation au processus de paix initié en octobre 2011 par la déclaration d’Aiete.Parmi les seize personnes interpellées, trois sont des avocats d’inculpés au méga procès de Madrid de 35 militantEs indépendantistes (dont Aurore Martin et Haizpea Abrisketa, du Pays basque Nord). Les arrestations ont eu lieu le jour même de l’ouverture du procès. La veille, le président du gouvernement espagnol Rajoy défilait à Paris avec Hollande en faveur de la liberté d’expression… Hypocrisie et manipulation manifestes !Au cours de la même opération, 90 000 euros ont été saisis dans les locaux du syndicat LAB. Cet argent venait d’une collecte réalisée lors de la manifestation du 10 janvier à Bilbao qui a réuni 80 000 personnes en faveur du rapprochement et du regroupement des prisonnierEs au Pays basque. Madrid cherche aussi à empêcher la solidarité économique.Le procès a été suspendu et reporté au 29 janvier. Les avocats ont été libérés quelques jours après mais mis en examen. Le passeport leur a été retiré et leurs contacts avec les prisonniers sont limités.
Pour une une résolution démocratique, politique et pacifique du conflitCes arrestations touchent aux droits fondamentaux de la défense, droits en principe garantis par des conventions européennes. L’État espagnol entrave la défense juridique des prisonnierEs, voire cherche à les priver de leurs avocats. Ces avocats spécialistes de la question basque sont parvenus à neutraliser la « doctrine Parot » qui permet à Madrid de retarder les mises en liberté. Une soixantaine de prisonniers ont ainsi été libérés. La leçon a été retenue par Madrid qui complique maintenant par tous les moyens la voie légale empruntée par les prisonniers et leurs avocats.Cette nouvelle atteinte s’ajoute à celle que constitue en lui-même le procès des 35 qui sont en effet poursuivis pour leur simple activité politique (participation à des meetings, réunions etc.).Et Madrid n’en reste pas là. Cette même semaine, le Tribunal suprême espagnol, au mépris de la législation européenne, a décidé qu’il n’appliquera pas la loi sur la confusion des peines. C’est-à-dire qu’une partie de la peine d’un prisonnier déjà accomplie dans une prison d’un pays étranger, en France par exemple, n’est pas reconnue par le Tribunal et devra à nouveau être effectuée dans les geôles espagnoles. 56 prisonnieEs sont concernés et leurs familles avec eux.L’État espagnol – et à sa suite l’État français – maintient la voie répressive, alors que la société basque et nombre de ses organisations sont engagées dans la résolution démocratique, politique et pacifique du conflit. Ce refus de tout dialogue, ce blocage, cette répression tous azimuts sont autant de freins au processus de paix et relèvent de la provocation. Mais la société basque est ancrée dans sa volonté du triptyque « Droits de l’homme – Résolution – Paix », base des mobilisations.Pour dénoncer ces nouvelles attaques aux droits démocratiques, des manifestations ont eu lieu au Pays basque, en particulier lundi et vendredi dernier à Bayonne et samedi à Saint-Sébastien. La mobilisation va s’amplifier pour faire reculer le gouvernement espagnol... et le gouvernement français bien sûr !
Claude Larrieu