À la veille de son investiture qui a lieu vendredi 20 janvier, Trump est engagé dans une fuite en avant faite de surenchères démagogiques, d’imbroglio complotiste dans ses relations avec Poutine et ses propres services secrets, dans la gestion de son empire immobilier et financier, dans la mise en place d’un pouvoir familial entouré d’oligarques...
Ce bel ensemble laisse augurer d’une politique qui ne pourra qu’aggraver le chaos globalisé dans lequel la classe capitaliste entraîne le monde.
FSB et CIA à la manoeuvre
« Je pense que c’est une honte que des agences de renseignement permettent la diffusion d’informations fausses, comme si on était dans l’Allemagne nazie », a tweeté Trump après la publication par le site BuzzFeed d’un document décrivant des faits compromettants, dont ses frasques sexuelles à Moscou, qui aurait été transmis par le FSB (les services secrets russes) et que la CIA aurait laissé publier sans contrôle...
La CIA et le FBI ont par ailleurs publié un rapport qui accuse directement les services secrets russes d’avoir, avec l’assentiment de Poutine, favorisé la victoire de Trump. Vrai, faux ? Manipulation de l’opinion ?
Dans le même temps, les secrétaires pour les Affaires étrangères et la Défense choisis par Trump le contredisent sur ses rapports avec Poutine, l’accord sur le nucléaire iranien, le changement climatique... Et le chef de la CIA demande à Trump de « se discipliner »...
Ce vaudeville d’État met en scène les contradictions et les difficultés dans lesquelles se trouvent les USA pour affronter la crise internationale provoquée par la mondialisation financière, redéfinir leurs alliances face à la Chine et une Europe en explosion.
Népotisme et oligarques
« C’est le meilleur cabinet de l’histoire, la plus grande concentration de QI élevés dans un gouvernement, les meilleurs tueurs dont dispose l’Amérique », déclare Trump à propos de son futur gouvernement. Quel éloge !
Ainsi il a nommé comme conseiller de la Maison-Blanche son beau-fils Jared Kushner, milliardaire marié à sa fille Ivanka et proche du magnat des médias Murdoch. Il cède le contrôle de sa société immobilière à ses deux fils. « Ils la dirigeront de façon très professionnelle. Ils ne m’en parleront pas », dit-il sans rire !
Ce petit monde très familial sera entouré d’autres oligarques de Wall Street, parfaits représentants de l’aristocratie financière.
Protectionnisme, xénophobie et égoïsme national
« Je crois que je vais devenir le plus grand producteur d’emplois jamais créé par Dieu », assure Trump avec une ironie cynique qui ressemble à une forme de sincérité. Quel est l’imbécile qui pourrait me croire semble-t-il dire ! Et il se félicite de l’intérêt que lui ont porté des financiers de la planète entière, dont Bernard Arnault...
Le Mexique, deuxième économie d’Amérique latine, signataire de l’Accord de libre-échange nord-américain (Alena), est au centre des attaques de Trump qui menace de rompre cet accord si il ne se plie pas à ses exigences. Le pays est aussi la principale cible de la propagande xénophobe du futur président qui continue de prétendre le contraindre à endosser les frais de construction du « mur » sur la frontière sud des États-Unis. Une campagne raciste qui vise pêle-mêle les Latinos, les musulmans, les Noirs...
Yes we can ?
Au-delà de la personnalité de Trump ou plutôt à travers sa personnalité, son cynisme, son arrogance, son mépris des travailleurs et des peuples, son attitude ubuesque de monarque de l’aristocratie financière, se manifeste la décomposition des classes dominantes corrompues par leur parasitisme, la concentration sans limite du capital, et aveuglées par leur pouvoir. Elles plongent le monde dans la pauvreté, la guerre, dressent les peuples les uns contre les autres pour perpétuer une domination faillie et dépassée.
Dans son discours d’adieu, Obama a prétendu, « Yes we did », « nous l’avons fait », pour faire son propre éloge. Pourtant, tout ce que lui et les Démocrates ont fait, c’est ouvrir la porte à la pire réaction, comme ici Hollande et Valls ouvrent la porte à Le Pen. Les seuls qui peuvent empêcher l’avenir monstrueux que les Trump et les Le Pen nous préparent, sont celles et ceux qui descendent dans la rue, à Washington et ailleurs. Ce sont les travailleurs, les classes populaires, les jeunes, en prenant leurs affaires en main, l’avenir de la société, pour construire un monde fondée sur la coopération et la solidarité. Yes we can !
Yvan Lemaitre