Publié le Vendredi 23 mai 2025 à 11h00.

Ukraine : Poutine, la guerre à tout prix

Les défilés du 9 mai à Moscou pour les 80 ans de la victoire contre l’Allemagne nazie mettaient en scène, la réhabilitation partielle du régime russe sur la scène internationale. Les dirigeants de 24 pays étaient en effet présents, dont Xi Jinping, Lula, Maduro, al-Sissi, ainsi que, pour l’Europe, le président serbe Vučić et le Premier ministre slovaque Fico. 

De nouveau, le récit de la « Grande guerre patriotique » est devenu le chaînon essentiel dans la propagande poutinienne qui souhaite se draper des habits de l’anti­fascisme (sic). Cela permet entre autres d’invisibiliser le pacte de non-agression entre Staline et Hitler — incluant l’annexion et le partage de la Pologne et des pays baltes entre les deux puissances — et l’invasion sanglante de la Finlande par l’URSS quelques mois plus tard, ainsi que de désigner la Russie — et non tous les peuples de l’URSS qui en payèrent le prix fort —comme l’héritière exclusive de la victoire contre le nazisme.

Une négociation en Turquie

Cette stratégie propagandiste pour donner l’image d’une Russie forte et implacable s’est accompagnée d’un signal à Trump, en témoignage de bonne volonté : une proposition de négociation directe avec l’Ukraine, en Turquie, sous l’égide d’Erdogan. Zelensky, soutenu par les chefs d’État français, allemand, polonais et anglais en visite à Kyiv, a répondu par la proposition d’un cessez-le-feu inconditionnel de 30 jours comme condition préalable à toutes négociations, avec renforcement des sanctions économiques en cas d’un énième refus russe. La réponse du Kremlin : « une menace inacceptable ». Le président ukrainien a décidé néanmoins d’aller en Turquie, se déclarant prêt à une rencontre avec Poutine, pour prouver encore une fois, si besoin en était, que le désir de paix se trouve du côté des premières victimes de cette guerre, la population d’Ukraine. Marco Rubio a immédiatement été dépêché par Washington, et Trump a même laissé planer le doute sur la possibilité d’un détour par la Turquie dans le cadre de sa tournée au Moyen-Orient. 

L’Ukraine reléguée

Il est devenu vite évident que Poutine ne viendrait pas. Il a envoyé des négociateurs de second rang porteurs d’exigences maximalistes, notamment le retrait des UkrainienNEs des territoires encore incontrôlés par les Russes dans les 4 régions partiellement occupées et la démilitarisation de l’Ukraine. L’échange réciproque de 1 000 prisonnierEes ne peut cacher la triste réalité : Poutine, fidèle à sa doctrine, va jusqu’au bout de ses objectifs de guerre, à savoir la capitulation complète de l’Ukraine. S’il persiste tout de même un faible espoir de réouverture d’un canal de discussion diplomatique entre les deux pays, cet espoir est vite douché par un tweet de Trump, annonçant que « rien ne se passera » sur l’Ukraine tant qu’il n’aura pas lui-même rencontré Vladimir Poutine. Ainsi l’Ukraine est de nouveau reléguée au second rang, et Poutine, lui, peut sourire. Erdogan, de son côté, a profité de l’occasion pour faire oublier la répression de grande ampleur qu’il a engagée contre la principale opposition du pays.

Réarmements mondiaux et partage de la planète

Si les espoirs d’une paix négociée sont légitimes, ils ne pourront se réaliser que si l’agresseur s’y résout, ou plutôt s’y voit contraint. Et tout indique que Poutine se prépare à l’inverse : les chiffres de production industrielle militaire en Russie ont atteint un nouveau pic début 2025 ; des déplacements de troupes importants ont été identifiés près des zones de front ; de concert avec la Russie, la Chine a déclaré qu’il fallait résoudre « les causes profondes de la guerre » et a annoncé renforcer sa coopération militaire avec Poutine, lequel a déclaré quant à lui son soutien à l’annexion de Taïwan. La Corée du Nord a officiellement acté sa participation à la « défense » du front russe.

La guerre poutinienne comme la guerre génocidaire d’Israël sont des carburants aux réarmements mondiaux, autant qu’aux extrêmes droites et leurs projets de société. La résistance des peuples qui y font face est le meilleur antidote à la folie meurtrière qui s’empare de la planète. 

Elias Vola